On m’a demandé de donner la liste de mon top 5 de l’année 2021, et le premier album qui m’est venu à l’esprit ne pouvait pas y figurer puisqu’il date de 2020. Force est de constater que son empreinte ne me quitte plus depuis sa sortie en novembre 2020.
Heureusement, la réédition de cet album, Paradis, quatrième de Ben Mazué, me permet d’écrire ce que je n’ai pas pu dire. Car il y a beaucoup à dire de cet album au titre trompeur avec sa pochette sur fond de Douanier Rousseau, alors qu’il évoque en douce une rupture, en équilibre fragile, balancé entre souvenirs encapsulés et réalité d’une nouvelle solitude à explorer.
Les trois morceaux inédits de cette réédition, L’envie, Passager et Des nouvelles, sont une suite logique de cette introspection.
Entretemps, j’ai remarqué qu’il m’était impossible d’écrire une chronique autrement qu’avec sincérité, et c’est bien de cela que l’on parle ici. Les mots de Ben Mazué ne nécessitent pas d’être réinterprétés, cet album se déroule et se reçoit comme une simple vérité. Ce qui plaît dans cette vérité, c’est qu’elle se pare de poésie, même dans ses parts les plus terre-à-terre. Si la voix de Ben est légère, elle traduit une certaine pudeur, et ne s’attarde pas sur le côté « drama » d’une vie. Elle permet en revanche de se laisser entraîner par les notes de Guillaume Poncelet, quitte à ce que le piano et les cuivres occupent l’esprit de manière entêtante. C’est peut-être là, la clé du succès des paroliers, chanteurs et musiciens français, ceux que la « variété » n’a pas encore fanés : un peu de réel, des mélodies habiles, semées d’attentions et de sentiments discrets, dont chacun est libre de s’emparer, ou non.
C’est certainement la force de ce duo, d’une amitié, et cette authenticité cultivée depuis déjà dix ans qui donnent corps à ce quatrième opus. Aussi, Ben Mazué est loin de son premier essai, et cela se voit. Si la vraie vie n’est pas toujours sexy, c’est peut-être d’albums comme celui-ci dont on a parfois besoin, ce genre qui fait qu’à l’intérieur, ça brille. Alors merci Ben Mazué, car on ne l’exprime jamais assez, cette gratitude que l’on ressent, quand la musique nous fait vibrer, avec ce qui vient du dedans.