Andrew Wan, violon solo à l’Orchestre symphonique de Montréal et Charles Richard- Hamelin, reconnu comme un des meilleurs pianistes de sa génération, parachèvent avec cet album leur enregistrement de l’intégrale des sonates pour piano et violon de Beethoven, projet qui a débuté en 2018. Le premier volume de cette série intégrale a d’ailleurs été considéré comme l’un des meilleurs albums classiques de cette année-là par Radio-Canada. Le présent album met à l’honneur les sonates no 4, no 9 et no 10.
Composé parallèlement à la Sonate no 5 en fa majeur op. 24 dite « Le Printemps » et contemporaine de la Première symphonie du compositeur, la Sonate no 4 en la mineur, op. 23 se distingue par son écriture pianistique fine et épurée où les lignes mélodiques du piano faisant entendre parfois une seule voix donnent l’impression d’une texture de trio à cordes. Cela est particulièrement vrai dans le premier mouvement, Presto, d’une vive énergie où dès les premiers accords, le tapis harmonique mis en relief par le jeu de Wan, nous donne l’impression fantomatique d’un troisième instrumentiste.
La Sonate no 9 en la majeur, op. 47 aurait dû nous parvenir sous le nom de Sonate Bridgetower, telle que dédicacée par Beethoven à l’intention du violoniste anglais afro-descendant avec qui il l’a créé en 1803. Un différend avec l’interprète amena Beethoven à retirer le nom de Bridgetower pour la dédier à son ami Rodolphe Kreutzer qui, ironiquement, ne la joua jamais, la trouvant « inintelligible ». Point confuse, cette sonate est une compétition musicale de virtuosité qui met pleinement en valeur la technique rigoureuse de Wan et le jeu habile d’Hamelin qui entremêlent leur ligne musicale et font dialoguer énergiquement leurs instruments, notamment dans le fougueux troisième mouvement. Concluant ce voyage, la Sonate no 10 en sol majeur, op. 96 se distingue par son changement de dynamique relativement aux deux précédentes avec un lyrisme intérieur et des textures harmoniquement nuancés dans les deux premiers mouvements avant de laisser place à un Scherzo contrasté et une finale en thème et variations chantante et mordante.
Impeccable du début à la fin, à l’écoute l’un de l’autre et uni dans une expression cohérente de multiples dynamiques et nuances, le duo de choc que forme Andrew Wan et Charles Richard-Hamelin livre avec brio la marchandise et nous laisse espérer qu’une telle collaboration continuera.