La saison 2024-2025 de l’ONJM se termine avec la jeune étoile montante de la clarinette Virginia MacDonald, qui interprète la Starbirth Suite de Jean-Nicolas Trottier, une création mondiale écrite pour la jazzwoman torontoise.

La clarinettiste lauréate d’un Juno est sans conteste une virtuose de la clarinette de sa génération. Reconnue pour ses grandes compétences, sa fluidité, son timbre et son excellent phrasé en tant qu’improvisatrice, elle est devenue une soliste attrayante pour des projets ambitieux comme cette Starbirth Suite, un titre qui correspond parfaitement à son statut actuel.

Virginia MacDonald est actuellement très active en tant que chef d’orchestre, sidewoman ou compositrice. Elle joue dans le monde entier et représente fièrement la nouvelle scène jazz canadienne.

En 2020, Virginia a remporté le premier prix de l’International Clarinetist Corona Competition, dont les juges étaient Anat Cohen, Victor Goines, Ken Peplowski et Doreen Ketchens. Elle a récemment été choisie comme l’une des trois finalistes du prix 2024 Breakthrough Jazz Artist Award de la Toronto Art Foundation. Elle a également reçu le prix Stingray Rising Star en 2019 et a été nommée parmi les trois finalistes du prix Emerging Jazz Artist Award de la Toronto Arts Foundation en 2021. En 2023, elle a été choisie pour être la tête d’affiche de la célébration du 50e anniversaire de l’International Clarinet Association au ClarinetFest de Denver, au Colorado.

Virginia a enregistré et s’est produite avec des artistes de renom tels que Kirk Lightsey, Geoffrey Keezer, Ira Coleman, Michael Dease, Dick Oatts, Joe Magnarelli, Harold Mabern, Bruce Barth, Derrick Gardner, Rodney Whitaker, Xavier Davis, Quincy Davis, Rudresh Mahanthappa, Bill Cunliffe, Randy Napoleon, Jon Gordon, (son père) Kirk MacDonald, Pat Labarbera, Neil Swainson, Terry Clarke.

Virginia is a member of the Canadian Jazz Collective, a seven-piece ensemble of award-winning and established Canadian jazz musicians. She appeared on the Canadian Jazz Collective’s debut album “Septology”, which was nominated for a Juno Award for Jazz Album of the Year in 2024.

Virginia a participé à l’album de Caity Gyorgy « Now Pronouncing », récompensé par un Juno en 2022, et à son successeur « Featuring », récompensé par un Juno en 2023. Elle a récemment collaboré avec le tromboniste Michael Dease, lauréat d’un Grammy Award, et a participé à son album « The Other Shoe : The Music of Gregg Hill » (2023) et « Found in Space : The Music of Gregg Hill ». Sa composition « Up High, Down Low » figure sur l’album « Swing Low » de Michael Dease, sorti en 2023. Virginia a participé à plus de vingt albums en tant que sidewoman.

Le premier album de Virginia sortira en 2025 sur Cellar Live. Elle y présentera des compositions originales pour son quartet composé de vétérans du jazz tels que l’Américain Geoffrey Keezer au piano ou l’Américain Ira Coleman à la basse, ainsi que des voix de sa génération, le batteur new-yorkais Curtis Nowosad et la chanteuse française Laura Anglade.

C’est pourquoi notre collaboratrice PAN M 360, Mona Boulay, lui a posé quelques questions avant sa venue à Montréal – samedi 19 avril, 20h, Place des Arts, Cinquième Salle.

PAN M 360 : Starbirth est une pièce écrite par Jean-Nicolas Trottier spécialement pour vous. Comment cette rencontre artistique s’est-elle produite et comment avez-vous été impliqué (si tant est que vous l’ayez été) dans le processus de création de cette œuvre ?

Virginia MacDonald : Avant de rencontrer Jean-Nicolas, j’ai été présentée à Jacques Laurin par un ami et collègue commun, le merveilleux pianiste cubain Rafael Zaldivar. Nous avons parlé de la possibilité de collaborer un jour, et ce projet est né de cette conversation. Lorsque Jean-Nicolas m’a proposé l’idée d’écrire une suite pour moi, j’ai été très honoré et j’ai accepté. Je connaissais son écriture, et son mentor Joe Sullivan a beaucoup travaillé avec mon père Kirk MacDonald. Je voulais qu’il ait toute latitude pour conceptualiser la musique, c’est pourquoi je ne l’ai guidé que sur quelques petits détails techniques. Je suis très heureux du résultat de cette suite et j’ai hâte de la présenter.


PAN M 360 : La clarinette est un instrument qui a joué un rôle important dans les débuts du jazz et qui a été négligé dans le monde du jazz moderne après la Seconde Guerre mondiale. Il y a eu quelques exceptions, mais plus récemment, de nombreux clarinettistes l’ont remise au goût du jour. Quelles sont les inspirations qui vous ont conduit sur la voie de la clarinette de jazz ?
Virginia MacDonald: The clarinet has had a very interesting role in the lineage of this music. It was such an integral instrument within the realm of early jazz, but for what could be any number of reasons (inadequate microphone technology, the saxophone being the louder instrument of the two and allowing for easier projection over a loud rhythm section, etc.) it fell out of favour from the bebop era and onwards. 

J’ai commencé à jouer de la clarinette à l’âge de sept ans – mon père est saxophoniste de jazz et je plaisante toujours en disant que je ne voulais pas jouer du même instrument que lui, mais en réalité, lorsque j’ai vu la clarinette pour la première fois, mes yeux se sont illuminés et j’en suis tombé amoureux. Ce n’est que lorsque j’ai été plus âgé et que j’ai commencé à fréquenter le lycée que j’ai réalisé que la lignée de l’instrument dans cette musique s’était arrêtée à un moment donné. Il y avait bien sûr des exceptions notables. Mon clarinettiste préféré, Jimmy Giuffre, utilisait l’instrument d’une manière qui, je crois, était incroyablement en avance sur son temps. Je pouvais aussi m’inspirer de musiciens modernes comme Anat Cohen et Paquito D’Rivera. Mais pour l’essentiel, je me tournais vers des musiciens qui jouaient du saxophone ou de la trompette, des pianistes ou des chanteurs, et j’essayais d’imiter ce qu’ils faisaient à ma façon. J’avais vraiment l’impression que la clarinette était un instrument méconnu et que les gens devaient lui donner une chance et l’entendre dans un contexte plus moderne pour comprendre ce dont elle était capable.

PAN M 360 : Après avoir participé à de nombreux albums d’autres artistes, vous vous apprêtez à sortir votre propre album en 2025. Êtes-vous plus enthousiaste à l’idée de sortir votre propre projet que de collaborer avec d’autres artistes ?
Virginia MacDonald : Tout au long de ma carrière, j’ai eu l’occasion de travailler énormément en tant qu’accompagnatrice, et j’ai eu la chance de jouer avec des musiciens qui ont été mes héros personnels et mes sources d’inspiration. Je ne pense pas que j’aurais les connaissances et l’expérience que j’ai aujourd’hui si je m’étais uniquement concentré sur mes propres projets. On apprend beaucoup en travaillant avec d’autres musiciens et en essayant d’interpréter et de jouer leur musique au maximum de ses capacités. Mais il y a aussi une grande liberté et un sentiment d’accomplissement dans le fait d’écrire sa propre musique et de la voir aboutir. J’ai l’impression d’être arrivé à un point où j’apprécie vraiment l’équilibre entre la participation aux projets des autres et la concentration sur ma propre musique.

PAN M 360 : Comment avez-vous procédé pour composer ce nouvel album ?

Virginia MacDonald : Cet album est un pot-pourri de musiques que j’ai écrites au cours des dix dernières années environ, et j’ai vraiment l’impression qu’il reflète ce que j’ai vécu à différents moments au cours de cette décennie. J’ai la chance que certains de mes musiciens préférés aient accepté de collaborer avec moi sur ce projet, notamment Geoffrey Keezer au piano, Ira Coleman à la basse, Curtis Nowosad à la batterie et Laura Anglade au chant. Pour moi, la création de cette musique est toujours le fruit d’un effort commun et je suis très attaché à l’idée que « le tout est plus grand que la somme de ses parties ».

PAN M 360 : Vous avez eu la chance de vous produire au Canada, aux États-Unis et en Europe. Y a-t-il un lieu, une scène ou un festival qui vous a le plus marqué ?

Virginia MacDonald:  As of now, I spend over half of the year on the road and I’m constantly travelling from city to city. It doesn’t lose it’s novelty if you can keep that sense of curiosity and wonder. I love going to new places, and I try to make the most of wherever I am. Performing in India was incredibly special to me…I don’t know, I love it all.

PAN M 360: As well as being an incredible musician, you also give master classes and workshops. How do these two aspects of your career (musician and teacher) co-exist? 

Virginia MacDonald : Les deux sont très liés. Je dois beaucoup à mes mentors, et j’ai eu (et j’ai toujours) beaucoup de chance d’en avoir eu d’excellents. Il ne fait aucun doute qu’être musicien n’est pas un chemin facile ou direct. Nous avons tous besoin d’être guidés, quel que soit le stade auquel nous nous trouvons. « L’éducation musicale, à son niveau le plus élevé, est réciproque – on reçoit ce que l’on donne et on donne ce que l’on reçoit, si l’on est ouvert à ces deux possibilités. Il y a quelque chose à apprendre des jeunes musiciens et de l’esprit et de la vitalité qu’ils possèdent, et il y a beaucoup à apprendre de nos aînés et de leur ténacité, de leur expérience de la vie et de leur sagesse. J’aime enseigner parce que j’ai l’impression que la poursuite de l’apprentissage et de l’amélioration dans tout ce que nous faisons est si excitante et infinie… et fait partie intégrante de l’être humain. Il est passionnant de partager ce sentiment, à la fois en tant qu’élève de la musique et de l’autre côté en tant que mentor.

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ARTISTS

DIRECTION: Jean-Nicolas Trottier

SOLISTE INVITÉE: Virginia MacDonald, clarinette

SAXOPHONES: Jean-Pierre Zanella, Samuel Blais, André Leroux, Frank Lozano, Alexandre Côté

TROMPETTES: Jocelyn Couture, Aron Doyle, David Carbonneau, Bill Mahar

TROMBONES: David Grott, Édouard Touchette, David Martin, Jean-Sébastien Vachon

PIANO: Marianne Trudel

CONTREBASSE: Rémi-Jean Leblanc

BATTERIE: Kevin Warren

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Les saxophonistes et jazzmen Yannick Rieu et Lionel Belmondo se fréquentent musicalement depuis les années 90, période pendant laquelle Rieu vivait en France et a maintes fois partagé la scène avec son collègue français. Cette amitié indéfectible culmine ce mercredi 16 avril à la salle André-Mathieu, alors qu’un sextette de jazz partagera la scène avec l’Orchestre symphonique de Laval. Présentées en première mondiale, les œuvres au programme ont été composées par Rieu et Belmondo, inspirées de Johannes Brahms, Maurice Ravel et Lili Boulanger. À la veille de ces créations, les deux solistes s’entretiennent avec Alain Brunet sur PAN M 360.

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Programme

Œuvres pour sextet de jazz et orchestre basées sur Brahms, Ravel et Boulanger

1ère partie (40 min)

1. Lines (Yannick Rieu)
2. Menuet en ut dièse mineur (Maurice Ravel)
3. Nocturne (Lili Boulanger)
4. Passacaille (Maurice Ravel)

Entracte (20 min)

2ème partie (35 min)

1. Africa Brahms (Yannick Rieu)
2. Ballade sur le nom de Maurice Ravel (Lionel Belmondo)
3. Embrahms-moi (Yannick Rieu)
4. Estebania-Pharaon (Lionel Belmondo-Yannick Rieu)
5. La couleur de l’eau (Lionel Belmondo)
6. Nostalgie (Yannick Rieu)
7. Ritournelle (Yannick Rieu)

Artistes

Orchestre symphonique de Laval

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Daniel Bartholomew Poyser

Chef d’orchestre 

Lex French

Trompette

Jonathan Cayer

piano

Rémi-Jean LeBlanc

contrebasse

Louis-Vincent Hamel

batterie

Louise Forestier, octogénaire lumineuse et figure mythique de la culture québécoise, pourrait couler des jours tranquilles dans son douillet condo jouxtant le parc Laurier. Or, la dame ne carbure pas au sentiment du devoir accompli, elle a encore cette envie de mettre au défi  toutes ses capacités cognitives et créatives. Visiblement, elle ne tient rien pour acquis. 

Ce qu’elle a accompli avec le compositeur Louis Dufort est un exploit d’ouverture et d’innovation, preuve de pérennité artistique si on en alimente la flamme et la fleur. 

Associé au monde électroacoustique et au festival Akousma dont il est le directeur artistique, Louis Dufort courait le risque d’enrober un album  suranné. Louise Forestier aurait pu faire rire d’elle pour les mêmes raisons. Ensemble, ils ont plutôt choisi de foncer.

Vieille corneille s’avère un enregistrement excellent et n’a rien, strictement rien d’un dilemme cornélien. Cet album survivra au temps et comptera parmi les principaux de la discographie de Louise. PAN M 360 l’a souligné à grands traits, ce qui justifie cette longue conversation entre Louise Forestier, Louis Dufort et Alain Brunet.

PAN M 360 : c’est vraiment un travail à deux ce projet. L’un.e sans l’autre, ça n’aurait jamais donné un tel résultat. Ce n’est pas exactement un producteur/compositeur qui est au service de Louise Forestier.

Louis Dufort : Absolument. Mais c’est quand même Louise qui a toujours été la force motrice, créatrice du projet. C’est elle qui l’a initiée. C’est elle qui est venue me chercher. C’était ma directrice artistique jusqu’à un certain point. C’est toujours elle qui a eu le dernier mot sur tout. Sauf qu’elle disait oui à tout essentiellement haha!

Louise Forestier : Si il y avait eu un conflit, ça n’aurait pas marché. En création, si à un moment donné, ça tire la couverture, c’est que ça ne marche plus.

PAN M 360 : On sent néanmoins une certaine autonomie créatrice de chaque côté.

Louis Dufort : Jusqu’à un certain point, le processus créatif était essentiellement jusqu’à un certain point dans ma cour. C’est-à-dire que j’ai proposé des maquettes à Louise, Louise a choisi quel texte y poser, puis elle est venue enregistrer ses mélodies sur les maquettes. Il  fallait alors que je termine la composition. C’était donc  sur des échafaudages. Louise venait me porter sa voix et puis on ajustait. 

PAN M 360 : Plusieurs allers-retours?

Louis Dufort : Non. Une seule rencontre pour chacune des pièces. Puis les voix c’était des one takers, il y a eu plusieurs prises de son, mais les formes longues et achevées résultaient d’une seule prise.  

Louise Forestier : Louis m’a donné des tapis volants pour y poser mes textes.  Je l’appelais, je lui disais, ça c’est un peu long ou ceci est de telle autre manière. On créait une charpente musicale et on y posait le texte et les voix.

Louis Dufort : À partir de là, je poursuivais la construction. Fallait que je me dépatouille. J’avais quelque chose qui était établi, fixé, autour duquel je devais construire et ornementer, transformer les timings, conserver la pureté de la voix de Louise.

Donc, oui, elle était, je la considérais comme une directrice artistique, mais elle était aussi la muse jusqu’à un certain point. J’ai pénétré dans son univers, dans ses mots, dans ses textes, dans sa sensibilité au-delà du texte. Une approche globale.

PAN M 360 : Ce n’était pas évident de faire l’alliage. Deux mondes très différents au départ!

Louis Dufort : J’ai eu des moments de grand doute. Je ne savais pas par où prendre ça, parce que ce n’est pas de la pop. Il n’y a pas de refrain nécessairement, mais en même temps, je voulais que ce soit une musique qui s’écoute. Je ne voulais pas  que ce soit de la virtuosité acousmatique. Je voulais vraiment servir le projet. Je pense que ça donne un résultat hybride, quand même super intéressant.

PAN M 360 : Si on se résume, Louis proposait une maquette sur laquelle Louise posait son texte.

Louis Dufort : Ce que je remettais à Louise était squelettique. J’ajoutais par la suite des moods, des ambiances, des séquences recomposées. Pour moi, tout ça était de la musique, il fallait s’ajuster à son interprétation. Elle-même, sa voix et ses mots, représentaient un instrument dans cette musique. Sans elle, la composition ne pouvait suffire, ne pouvait être achevée.

PAN M 360 : Il est vrai que Louise a un timbre, une façon de phraser parfaitement identifiable dès les premières mesures. Louise, tu as une voix naturellement riche et belle. Bon on a observé de petits écarts de justesse que très peu remarqueront, et il valait probablement mieux conserver tout ça si la vibe était bonne.

Louise Forestier :  Je pense qu’on en a corrigé deux qui m’énervaient vraiment. J’aurais pu tous les corriger mais non, c’est mieux de garder les aspérités.

Louis Dufort : Pour moi, le close-making de Louise, d’avoir l’approche, d’avoir les sons doux aussi fort que les sons forts pour avoir quelque chose où on entend toute l’entre gorge. C’est très présent.

PAN M 360 : Ce qui est aussi avantageux chez Louis, c’est qu’il n’est pas un pur académicien. Il vient de la pop, du hip-hop, de la soul/R&B, de la techno, de la house. Il comprend les codes des musiques populaires et donc il peut créer des hybrides concluants. Ce proje t s’inspire à la fois de formes pop et électroacoustiques.

Louis Dufort : Je pouvais vouloir plusieurs choses. C’est un drôle d’hybride, des trucs fin 70, des claps, puis un groove housy, un autre plus modal avec un rythme presque ravélien. On peut se retrouver aussi très près de la musique minimaliste américaine. Ou encore de la musique spectrale. Et puis du drone et de l’ambient. Ça peut être diaphane ou ça peut-être monumental.Oui, mais ça se conclut dans l’infini, dans le passage à d’autres dimensions. Louise a trouvé le terme parfait pour définir ce travail : un oratorio électro.C’est vraiment un truc à écouter du début à la fin, parce que c’est vraiment très interrelié, parce que c’est vraiment le récit. 

PAN M 360 : Il y a une forme de diffraction autobiographique, mais en même temps, il  y a aussi des réflexions qui sont sur la conjoncture actuelle, quand tu t’exprimes sur l’avenir, notamment sur le transhumanisme.  

Louise Forestier : Oui c’est fou ce qu’on soit rendus là.  

PAN M 360 : Tu en parleras dans ton prochain album! Mais revenons au processus de création. La banque de sons de Louis, par exemple.

Louis Dufort : Au fil des années, j’ai fait beaucoup de musique…J’ai déjà acheté beaucoup d’instruments. Ça vient de là ou encore je fais de l’échantillonnage aussi, comme tant d’artistes. Je ne suis pas différent des autres artistes, je n’ai pas non plus les moyens de me payer un orchestre symphonique. Mais j’ai besoin d’un accord majeur, fait que, tu sais, je vais aller chercher l’accord majeur dans une pièce de Mahler ou de Berlioz et je les transforme complètement.  

Mais, je te dirais que 80% des sons, c’est de la synthèse que je fais.

PAN M 360 : Tu as filtré complètement.  

Louis Dufort : J’ai aussi utilisé un logiciel de synthèse dynamique, qui me permet notamment de changer la temporalité d’un son de son domaine fréquentiel. Par exemple, un son qui dure 30 millisecondes, je peux le faire durer 2 minutes. C’est une forme de  synthèse granulaire, initiée jadis par les pionniers, de Pierre Schaeffer à Stockhausen à Barry Truax. C’est parfait pour la corneille!

PAN M 360 : Justement, parlons des textes de Vieille Corneille. Comme tu l’as raconté au lancement, tu avais été interpellée par une vraie corneille de ton jardin avec qui tu as carrément dialogué. Ce fut le point de départ d’un processus d’écriture et puis…

Louise Forestier : Quand j’ai rencontré Louis, mes textes étaient faits, sauf deux nouveaux. J’avais d’abord écrit plus d’une cinquantaine de pages. Puis j’ai élagué, purifié. J’ai enlevé ce qui était redondant, ce que je répétais sans m’en apercevoir quand je l’ai écrit. J’ai élagué, élagué, élagué, sans vraiment savoir ce que ça allait devenir.Je savais que ce n’était pas de la chanson. Je ne voulais pas écrire des chansons. Vieille corneille est d’ailleurs celle qui est la plus écrite sous la forme chanson.

PAN M 360 : Mais il y a quand même beaucoup de mots consonants, des fins de phrases qui peuvent être perçues comme des rimes.

Louise Forestier : On ne peut pas se déprogrammer. On ne peut arracher 60 ans de fréquentation avec la chanson. 

PAN M 360 : Ce n’était pas des rimes comme des chansons, mais ça rime souvent. 

Louise Forestier : C’est vrai. Je n’ai pas voulu m’en aller dans une abstraction intellectuelle. Je ne voulais pas ça mais je ne savais pas vers quoi ça irait.

Louis Dufort : Il faut aussi rappeler que la première pièce, elle l’avait faite avec Michel Rivard.. 

Louise Forestier :  Oui, il y a la guitare de Michel Rivard. J’avais commencé quelque chose. J’avais suivi le conseil de Dany Laferrière : si tu as peur, tu n’écris pas. Mais ce n’est pas si facile d’enlever la peur, ça ne part jamais au complet. Quand tu ne sais pas où tu t’en vas, c’est comme si tu conduisais les yeux fermés. J’y ai été pareil, parce que je n’ai plus rien à perdre. J’ai enregistré guitare-voix, très sagement, mon fils a fait la prise de son. Je ne savais même pas qu’il serait là! Entre-temps, Pierre-Alexandre Bouchard, qui est un ami et aussi  membre du conseil d’administration d’Akousma, me parle de Louis Dufort dont les trames musicales m’avaient vraiment séduite dans le cadre des spectacles de (la danseuse et chorégraphe) Marie Chouinard.

Louis Dufort : La pièce titre est pour moi un pivot, j’ai fait de la synthèse granulaire avec la guitare de Michel Rivard, j’ai repris la mélodie vocale fixée auparavant. J’ai pondu quelque chose de très différent, j’ai envoyé ça à Louise et elle a vraiment trippé. Elle a compris le sens de la chanson, ça a tout de suite cliqué. Tranquillement, on est allé dans l’univers plus ouvert de la corneille. Un trip à trois pour la première toune où là, les gens se mélangent, ce qui  nous a donné la caution pour aller plus loin à deux.

PAN M 360 : Les genres se mélangent et même les sous-genres  électroniques se mélangent dans la mesure où tu as ajouté du beat en certains moments. Tu utilises ça dans tes œuvres ambient, ça arrive qu’on en a, mais des fois c’est complètement atonal ou beaucoup plus proche du sillon de la musique concrète, donc beaucoup plus proche des sons bruts qui n’ont rien à voir avec des hauteurs musicales prédéterminées, mais là, il y a les deux. 

Louis Dufort : On voit que pour servir le texte et aussi servir Louise, c’est-à-dire qu’on ne pouvait pas aller complètement dans un univers de musique abstraite. Ce que j’ai trouvé passionnant pour moi, c’est que ne sachant pas où je m’en allais, j’écoutais les pistes, je les parlais, et tout à coup, tu vas te mettre à chanter. Au final, c’est un mélange des deux mais je ne  la savais pas à avance  

Louise Forestier : J’ai dû beaucoup écouter les enregistrements, car c’était la première fois que je faisais cet exercice. Là je choisissais de  chanter et là je ne chanterais plus, il  y avait des bouts trop longs, j’appelais Louis, et il me coupait ça.

Le soir-même, j’avais ma nouvelle version, c’était magnifique, ça allait vite. Après, des écoutes, des écoutes, des écoutes,  après avoir parlé, parlé, parlé,  ça a fini par se chanter tout seul.

PAN M 360 : Vous avez fait ça pendant cinq ans? 

Louise Forestier : Moi oui. Louis est arrivé deux ans et demi après le départ.

Louis Dufort : J’étais quand même très occupé. C’est sûr, c’est impossible de faire ça à temps complet. Et il faut dire que j’avais besoin de recul pour voir où ça allait. Au début, c’était un trip à deux, underground, puis à un moment donné, un label a été intéressé (LABE ), puis un disque allait sortir, un échéancier de production, tout ça, puis… Mais il ne fallait plus se tromper. C’était un peu naïf ou candide de ma part de penser que j’étais pour faire un disque underground avec Louise. Aujourd’hui, je suis content pour Louise, je suis content que le disque soit sorti. 

PAN M 360 : Aucun de vous deux n’a fait des projets  comme ça, on peut comprendre la nécessité d’avoir du recul.

Louise Forestier : On s’était serré la main, il m’a dit « Moi, je n’ai jamais fait ça ». J’ai répliqué: « Moi non plus, avec un musicien comme toi, je n’ai jamais fait ça ». 

PAN M 360 : On ne connaît pas de projet intergénérationnel de ce type. Ceux qu’on connaît, enfin les plus célèbres, restent sur le terrain de la pop ou de la chanson : Liza Minnelli avec les Pet Shop Boys, Jeanne Moreau avec Étienne Daho, Lady Gaga avec Tony Bennett, etc.

Louis Dufort : C’est vrai mais on ne faisait pas ça pour créer un exemple de fusion intergénérationnelle qui fonctionne.On a eu des bonnes discussions, des fois, après les sessions d’enregistrement, on clashait un peu, tu sais. Moi, quand j’ai lu Je m’appelle Je ou Les mots maudits», je me suis dit « Ah oui, vraiment, on va aller là, alors que  je pensais à des textes peut-être un peu plus flyés et moins directs. Je me suis dit « OK, il faut que je mette ça en musique. »  

PAN M 360 : Il y a plusieurs angles dans tes textes. Il y a les mots maudits que les jeunes progressistes s’interdisent de prononcer, il y a la vieillesse. Le nostalgie de la séduction, le déclin de la sensualité, la précarité de l’environnement, et ainsi de suite jusqu’au futur improbable des êtres humains en voie de mutation technologique.

Louise Forestier : Je ne me suis pas censurée de quoi que ce soit. La chanson L’Île flottante, par exemple, parle des changements climatiques. Ça me perturbe énormément. Je trouve que c’est un grand danger. Et puis on vient de perdre 15-20 ans…  

PAN M 360: Il y a au moins une bonne nouvelle, c’est que toi aussi. Louise, tu viens de perdre 15-20 ans avec la sortie de ce projet!

On la connaît depuis toujours comme la moitié blonde de son duo Les Sœurs Boulay » avec Mélanie, mais ça faisait depuis 2018 qu’on avait pas entendu Stéphanie en solo, alors qu’elle nous avait présenté son premier souffle individuel,  Ce que je te donne ne disparait pas. Elle revient cette année avec un nouvel album introspectif et sans filtres: Est-ce que quelqu’un me voit? 

Elle y explore les thèmes de l’amour, de son rôle de femme et de la définition du bonheur, pour ne nommer que ceux-la. Avec des teintes résolument pop dans ses arrangements, mélangeant les synthés et des lignes de basse bien définies à la guitare intemporelle, l’album nous emmène sur les rives de l’acceptation de soi, de l’envie de prendre sa place, du besoin de libération mais aussi de l’attente et de la patience, un des moteurs de l’album.

Réalisé par Alexandre Martel, complice de longue date, les 10 pièces furent d’abord esquissées lors d’une pré-production assez concise en studio où l’attention au détail de son collaborateur aura permis de trouver la direction sonore de celles-ci.

Fait saillant pour elle dans cet album : elle voulait sortir de sa zone de confort et se mettre à son propre diapason, en se prouvant qu’elle pouvait aussi faire les choses toute seule, sans avoir à s’appuyer sur quiconque. Marilyn Bouchard  a recueilli ses réflexions sur ce nouveau chapitre qui s’entame. 

PAN M 360: De quel besoin, dirais-tu , est né cet album? Quel feu a nourri sa création?

Stéphanie Boulay: Je venais de me séparer et en même temps, j’étais dans le processus  d’un diagnostic de neuro-divergence. Alors c’était une période où j’avais besoin de faire le point, à la fois sur ce que les autres/la société attendent de moi qu’au niveau de ce que moi j’attends de moi-même. J’avais besoin de m’assumer dans ce que je suis. J’étais chez moi toute seule avec mon chien et, comme mon rapport à l’écriture est très honnête, c’est tout ce qu’il me restait pour me rattacher à cette phase-là. J’ai eu besoin d’écrire. Et je me suis rendue compte que ça a toujours été ma bouée au final, l’écriture.

PAN M 360: Quelques chansons assez mélancoliques sur l’album,  Si l’essentiel c’est d’être aimé, Est-ce que quelqu’un me voit? , J’aurai pas d’enfants  et La nuit dure depuis trop longtemps  : avais-tu un surplus de tristesse à évacuer? Est-ce un album guérison?

Stéphanie Boulay: Définitivement. C’est un album guérison, un album reconstruction. J’avais besoin de dire le vrai et pas juste le beau, le négatif aussi, pour y faire face, pour m’en libérer. D’abord pour moi, un peu égoïstement, mais aussi pour les autres qui passent par des émotions similaires.

PAN M 360: De quelle manière as-tu voulu pousser plus loin la recherche amorcée dans  Ce que je te donne ne disparaît pas, paru en 2018?

Stéphanie Boulay: Tout d’abord, j’ai développé plusieurs nouvelles aptitudes dans le cadre de la création de cet album. J’ai fait de la recherche d’archives, à la fois vidéo et audio. J’ai aussi appris le montage et la photographie avec Alex Martel. Au niveau de la conception dans Ce que je te donne ne disparaît pas, on était vraiment dans une recherche de vibe, alors que pour celui-ci il y avait une attention particulière portée au choix et à la texture des sons. Alexandre est quelqu’un de très précis, de très minutieux, et on pouvait passer une heure à écouter un son. J’ai tout écrit et ensuite, on s’est enfermés en gang dans un chalet pendant 6 jours. Pendant la conception j’écoutais beaucoup de pop américaine, à la fois parce que j’en avais envie et ça me faisait du bien mais parce que j’avais envie que cet album-là soit plus pop. 

PAN M 360: Contrairement à ton premier album solo, on ne retrouve pas de collaboration sur celui-ci, est-ce parce qu’il est plus intime, plus personnel?

Stéphanie Boulay: Oui, définitivement. Aussi, puisque je viens d’un duo et que toute ma vie j’ai eu d’autres personnes pour me supporter, c’était vraiment important pour moi de me prouver que je pouvais faire les choses par moi-même. L’envie était forte par moments d’envoyer le matériel à d’autres personnes ou de recueillir des avis, parce que c’est ma zone de confort, mais j’ai voulu en sortir pour me donner le droit de prendre mon propre pouls. Il y a bien des choses sur cet album-là que je n’aurais même pas dites à mes amies, parce que j’aurais été gênée ou j’aurais eu honte, et  je ne voulais pas d’autocensure.

PAN M 360: Tu fais de la musique depuis toujours avec Mélanie en tant que l’une des sœurs Boulay, alors comment c’est de se dissocier de « ton autre moitié » et de vraiment mettre l’attention sur ton individualité musicale? Est-ce que ça te donne plus de liberté ou certains droits?

Stéphanie Boulay: Oui complètement! Il y a un certain registre plus cru ou tranchant que moi j’ai et que je ne me serais pas nécessairement sentie à l’aise d’exploiter aux côtés de ma sœur, vu que j’aurais voulu la protéger. Je suis une personne très bouillonnante, voire sans filtres, et je n’aurais pas voulu que ça puisse avoir de répercussions sur les autres. Je me garde une petite gêne, finalement, lorsque ce n’est pas solo. Aussi, on travaille beaucoup dans le compromis et là, il n’y en avait aucun à faire.

PAN M 360:  De quelle manière Alexandre Martel et toi avez trouvé la direction de l’album ? Il y a une belle exploration des synthés dans les arrangements, était-ce une direction 80’s recherchée?

Stéphanie Boulay: On avait déjà trouvé durant le pré-prod que les synthés étaient une direction qu’on voulait prendre sur l’album, mais ça a vraiment été avec l’apport de ma claviériste Camille Gélinas que tout ça s’est défini. Elle a tellement de sons cools, c’est une vraie fan de gear et on s’accompagne musicalement depuis longtemps alors c’est pas le biai de Camille que les synthés de l’album se sont mis en place.

PAN M 360: J’ai vraiment aimé découvrir Ces photos de moi qui apportait une touche sensuelle et surprenante à l’album, bien qu’en restant au diapason de l’œuvre. Serait-ce un aspect de toi que tu te permets moins d’explorer ou de nous partager?

Stéphanie Boulay: C’est une chanson qui me fait encore un peu peur, même si elle est sortie. Mais oui c’est un angle de ma personne que j’expose moins souvent et avec lequel j’ai encore un certain degré d’inconfort, mais qui est là. Tout comme sa partition vocale où j’utilise plus la voix de tête. C’est une des chansons sur l’album où on a figé la partition de basse durant la pré-prod et ensuite, tout le reste s‘est conçu autour. Je la vois un peu comme l’ovni de l’album hihi!

PAN  M 360: Les notions de patience et d’attente reviennent beaucoup tout au long de l’album. Dirais-tu que c’est le moteur de l’album? 

Stéphanie Boulay: La patience, oui. La résilience aussi. La capacité à accepter que tout n’est pas parfait dans le moment, et d’apprivoiser cet inconfort. Quelqu’un m’a dit : « Le bonheur, c’est d’avoir de bonnes heures ». Je trouve que c’est une belle manière de voir ça et que ça le rend peut-être plus simple.

PAN M 360: Qu’est-ce que tu planifies pour la suite de 2025?

Stéphanie Boulay: J’ai une tournée de spectacles planifiée qui se met en branle le 17 avril jusqu’en 2026. J’ai très hâte de donner vie à ces chansons-là sur scène avec ma gang.

PAN M 360: As-tu l’impression d’être parvenue à prendre ton espace, à exister à ta pleine mesure, à ce que « quelqu’un te voie » avec cet album?

Stéphanie Boulay: Totalement. Parce que je vais mieux, je suis plus solide. Cet album m’a permis de laisser-aller certaines choses et de m’en réapproprier d’autres.

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Nous ouvrons la porte et pénétrons dans La Lumière Collective, une grande pièce ouverte et lumineuse entourée d’affiches de films, d’œuvres d’art et de concerts. Une vieille télévision à tube évidée est entourée de livres et de disques au fond de la pièce. Des sièges de cinéma rouges sont disposés sur le côté, au milieu de la pièce, et un projecteur est suspendu au-dessus.

« Alors, ça y est », dit Jean Néant, en accrochant son manteau d’hiver, orné de la police de caractères classique du jeu vidéo DOOM. Néant crée des collages musicaux expérimentaux et électroniques sous le nom de scène de Joni Void. L’album, Every Life Is A Light, est également lié à cet espace, et il est donc logique que son lancement (qui ne sera pas un lancement d’album typique) ait lieu ici le samedi 12 avril avec Quinton Barnes.

Depuis 2016, ce collectif La Lumière est un vivier de créativité – le jour, un studio d’artiste partagé et un espace de résidence avec diverses ressources de production, et la nuit, un microcinéma qui présente des films d’artistes locaux et internationaux et d’autres œuvres vidéo. Néant y a organisé un événement audiovisuel avec son label/plateforme de capsules temporelles, Everyday Ago, en mai 2018. Pendant le set, ils ont collaboré avec Sonya Stefan, l’une des fondatrices de La Lumière Collective, en utilisant un projecteur avec du verre pour illustrer la réfraction de formes abstraites et psychédéliques.
« Nous ne nous connaissions même pas, mais elle jouait des boucles de films 16 mm en direct, tandis que je travaillais avec le projecteur, et c’est ainsi qu’a commencé une collaboration plus longue. Nous avons fait le deuxième album, Mise en Abyme, et tous les éléments visuels étaient d’elle. »
Peu après, Néant est devenu membre du collectif et a déménagé son matériel de musique dans l’espace. À un moment donné, ils ont même vécu dans l’espace pendant un mois. « Le nouvel album est une sorte de capsule temporelle de mes années 2022 à 2023 et est vraiment lié aux événements que j’ai pu faire ici après l’enfermement en 2022. Même le titre est une sorte de référence. »

Espace commun La Lumière

Dans le cadre de leur démarche artistique, Néant est également un grand cinéphile (ils ont quitté la France pour s’installer à Montréal afin d’étudier le cinéma il y a une dizaine d’années), liant toujours un élément visuel et cinématographique à leur musique par le biais des titres des chansons ou des vidéos qui les accompagnent. L’album précédent, Everyday Is A Song, comporte des titres intitulés Present Day Montage et Post-Credits Scene et le début de cet album commence par Everyday – A Sequel , poursuivant ainsi l’univers cinématographique de Joni Void. Ce genre de cinéma autoréférentiel est présent chez Néant depuis la sortie du premier album, bande originale d’un film qui n’existe pas, en 2011, sous le pseudonyme de johnny_ripper.

Néant est aussi documentariste, enregistrant sur le terrain divers sons qui sont souvent transformés en échantillons et utilisés pour alimenter les chansons qui touchent au downtempo, au trip-hop, à l’ambient, au drone et à bien d’autres choses encore. Et comme il s’agit de l’album le plus calme et tranquille de Joni Void à ce jour, avec des chansons qui ne dépassent jamais les 100 bpm, on a droit aux échantillons suivants du genre: le métro de Montréal, les voitures qui passent, les sirènes, le vent et les bavardages indéchiffrables des gens sont vraiment prédominants – tous dans la piste Du Parc (avec N NAO).

Néant cite l’émission documentaire DIY How To With John Wilson comme une « récente influence cruciale ». Cette émission traite de la découverte de soi et des observations culturelles de John Wilson, reflétant presque le travail d’enregistrement sur le terrain et l’identité musicale de Joni Void, l’influence est donc tout à fait logique. Ils citent également comme influence Tsai Ming-Liang, pionnier malaisien du « cinéma situationnel ».

« Je crée de la musique comme je ferais un documentaire. C’est pour documenter, mais aussi de manière imparfaite, parce que j’utilise la musique comme un médium », explique Néant.

« Je sors un disque de 45 minutes et je ne peux pas utiliser tous les enregistrements de Walkman que j’ai eus. La qualité est souvent épouvantable. Même avec l’appareil photo Polaroid, c’est l’idée de l’image imparfaite. L’appareil est très sensible à la lumière, et il y a un flash qui fait savoir à tout le monde que je suis en train de prendre la photo. Ces petites tranches de vie, la documentation que je peux intégrer dans une œuvre, donnent un sens à ces petits moments ».

Sur le plan sonore, Every Life Is A Light est l’album le plus « musical » de Joni Void. « Il y a beaucoup plus d’instruments et on peut distinguer la guitare, la ligne de basse ou la batterie. Les autres sont beaucoup plus abstraits », explique Néant. « L’intention était de faire un album musical.

L’un des aspects les plus forts de Every Life Is A Light réside dans les collaborations musicales qui le caractérisent, presque un pastiche des anciens collaborateurs artistiques et héros de Néant – dans le cas du rappeur Pink Navel sur le morceau Story Board. Il y a aussi la voix drone, dub et minimaliste de N Nao sur Du Parc, et la pop urbaine japonaise deTime Zone de Haco, sorte de légende dans le monde underground de l’avant-pop japonaise avec son groupe After Dinner, et qui se trouve être maintenant un ami en ligne de Néant.

« Bien sûr, je connaissais déjà N NAO parce que nous avions déjà collaboré ensemble sur Mise En Abyme et sur la cassette Simulateur de rêve lucide, mais beaucoup de ces collaborations étaient des coups dans le noir », expliquent-ils.

« Sook-Yin Lee, avec qui j’avais fait un concert, hors de l’enfermement, est devenue une grande amie et il était naturel que nous fassions une chanson ensemble, mais elle m’a vraiment surpris en ajoutant la batterie et la basse. Je ne m’attendais qu’à des voix et, bien sûr, elle a fait une sorte de vidéo musicale avec Dylan. »

Ils poursuivent : « Pour Pink Navel, je suis un grand fan de Ruby Yacht, le collectif de rap de R.A.P. Ferreira dont Pink Navel faisait partie, et qui a pris sa retraite. Pink Navel, qui s’appelle maintenant Devin Music, a fait un live stream en 2020, et je l’ai regardé ici à La Lumière Collective, et je me suis senti comme un enfant regardant les dessins animés du samedi matin avec leur musique. C’est juste, c’est juste que ça parle tellement de l’énergie maniaque d’un enfant. Je m’attendais à une énergie plus maniaque, mais ils sont revenus avec une énergie beaucoup plus discrète, axée sur les jeux de mots, et j’ai adoré.

Joni Void II par Quinton Barnes

Une autre collaboration chère au cœur de Joni Void provient de Joni Sadler Forever , une chanson hommage à la regrettée Joni Sadler, décédée en 2021, qui était un pilier de la communauté musicale montréalaise, portant de nombreux chapeaux en tant que coordinatrice musicale de CKUT, travaillant et faisant du bénévolat avec Suoni Per Il Popolo, Pop Montreal, Lux Magna, et faisant partie de l’équipe légendaire qui a réservé, rassemblé et rendu célèbre la Brasserie Beaubien. Elle a également travaillé chez Constellation Records et était une amie très chère de Néant. Elle a également été une batteuse redoutable pour le groupe Lungbutter, et son jeu de batterie est présent sur la chanson de clôture de Every Day Is A Light.

Pour le concert à La Lumière, Néant ne se produira pas, mais animera une séance de projection de quelques anciennes vidéos expérimentales et de séquences qu’il a prises avec des amis lors de spectacles à La Lumière et d’autres vidéos, comme une petite de son chat Muffin – qui a également une chanson hommage qui lui est dédiée, et qui est décédé en 2024 à l’âge de 20 ans.

« J’ai toujours plaisanté, même à l’époque de ma sortie, Selfless, qu’avec ma musique, le but était de vous faire danser au cinéma et de vous faire regarder des films expérimentaux en boîte », s’amuse Néant.

« Et je l’ai fait, j’ai réussi avec ce spectacle. C’est comme si vous regardiez des films expérimentaux dans la première moitié avec des chaises, et qu’ensuite nous nous débarrassions des chaises, et que vous dansiez le Quinton ».


A/V Co-Release Event for Quinton Barnes CODE NOIR & Joni Void Every Life Is A Light

Photo d’ouverture par Soledad Rosas

Marcus Printup, troisième trompette du Jazz At the Lincoln Center Orchestra, pédagogue du jazz , interprète prolifique et leader d’innombrables enregistrements en studio, donnera une classe de maître et collaborera avec le Big Band de l’Université de Montréal – les 15 et 16 avril respectivement. Le programme comprendra de nombreux arrangements réalisés par Printup lui-même, ainsi que certaines de ses compositions originales. PAN M 360 a eu la chance de correspondre avec M. Printup pour lui demander ce qu’il pensait de la pédagogie, du répertoire et même des routines d’entraînement avant ces deux événements. Cet entretien a été réalisé par Vitta Morales.

PAN M 360 – J’ai appris que vous donnerez une masterclass le 15. Étant donné que vous êtes très sollicité dans le domaine de l’éducation, qu’est-ce qui fait, selon vous, une bonne pédagogie du jazz ? Y a-t-il des leçons ou des approches que vous jugez primordiales pour transmettre des compétences en matière de jazz ?

Marcus Printup : Ma principale préoccupation est d’écouter les maîtres et d’imiter ce qu’ils ont fait. Si je devais lancer un programme de jazz dans une université, l’un des premiers cours que j’intégrerais serait un cours d’écoute. Non seulement j’apporterais de la musique, mais je demanderais aussi à chaque étudiant de présenter de la musique pour notre cours d’écoute. Il y a tant de musique à apprendre. Nous sommes parfois trop pris par l’étude de la théorie… qui est tout aussi importante ! Le simple fait de s’asseoir et d’écouter… d’éteindre le côté analytique du cerveau et de se concentrer sur les oreilles est sublime.

PAN M 360 – Vous avez déclaré précédemment que Amazing Grace était l’un de vos morceaux préférés et qu’en outre, votre exposition à la musique gospel vous a appris très tôt à jouer avec des inflexions de blues. Y a-t-il des hymnes ou des airs du répertoire gospel avec lesquels vous pensez que les gens devraient être plus familiers ?

Marcus Printup : L’un de mes albums préférés est AMAZING GRACE d’Aretha Franklin. Tout le monde devrait connaître ce disque ! Un autre hymne que j’aime est WHAT A FRIEND WE HAVE IN JESUS. Le préféré de ma mère était GOD IS REAL (Dieu est réel). Écoutez Mahalia Jackson la chanter !

PAN M 360 – Le Big Band de l’UdeM interprétera deux mouvements de The Journey Suite; une pièce que vous avez écrite, en partie, sur vos expériences universitaires. En repensant à cette période, y a-t-il un conseil que vous donneriez aux jeunes musiciens qui commencent ou qui sont en train de commencer leurs études musicales ?

Marcus Printeup : Ma devise est d’aller au-delà de ce qui est nécessaire. J’étais toujours le dernier à quitter la salle d’entraînement, généralement vers 3 heures du matin ! Je ne le recommande pas, mais à un moment donné, j’ai compris qu’il fallait aller au-delà de la norme pour atteindre la grandeur. Soyez assidus dans votre pratique et humbles, ayez une grande soif d’apprendre afin de pouvoir exprimer toute la beauté que Dieu vous a donnée.

PAN M 360 : Le répertoire du concert avec le Big Band de l’UdeM est très varié et comprend des arrangements d’œuvres de Max Roach, Antonio Carlos Jobim, Ron Carter, Marcus Miller et d’autres. Avez-vous un penchant pour une époque en particulier en ce qui concerne le répertoire de jazz ?

Marcus Printeup : J’aime TOUTE la musique. Chacun a quelque chose d’unique à exprimer, mais j’ai un faible pour Miles Davis. Il évoluait avec son temps, changeant constamment sa façon de composer et d’interpréter. Ce qu’il jouait, c’était la vie. Écoutez « So What » sur KIND OF BLUE (1959), puis écoutez-la cinq ans plus tard, en 1964, sur l’album FOUR AND MORE. Cette version de « So What » date de quelques mois après l’assassinat du président John F. Kennedy. Notre pays était en pleine tourmente à cause de cet événement et de bien d’autres problèmes. Miles était très conscient du racisme qui existait et on peut l’entendre dans sa musique. Cet enregistrement de 1964 de « So What » (et FOUR) est plus rapide et parfois en colère. Il pleure, il crie. Très intense. Je trouve aussi que c’est plutôt cool que trois des quatre noms que vous avez mentionnés dans votre question aient joué avec Miles !

PAN M 360 : Il a été dit à plusieurs reprises que le mentorat que vous avez reçu du pianiste Marcus Roberts a été extrêmement formateur ; le mentorat fait-il partie intégrante de la tradition du jazz telle que vous la concevez ? Le mentorat fait-il partie intégrante de la tradition du jazz telle que vous la concevez ? Comment le mentorat et la compétition coexistent-ils dans le jazz ?

Marcus Printup : Sans aucun doute. Marcus Roberts est celui qui m’a aidé à canaliser mon éducation gospel dans ma façon de jouer du jazz. Il m’a appris à plier les notes, à chanter à travers ma trompette, ce qui est une marque de fabrique de mon son. Tout cela, c’est grâce à cet homme. Je lui dois tout. J’ai également de nombreux étudiants que j’encadre. C’est l’accomplissement le plus gratifiant que l’on puisse réaliser en aidant les autres à trouver leur voie.

Quant à la compétitivité du mentorat, je n’y vois rien de valable. Nous sommes des musiciens. Nous faisons de la musique pour que les gens se sentent bien. Peut-être qu’une concurrence saine est une bonne chose. Tant qu’elle ne se transforme pas en envie. C’est formidable d’être poussé par quelqu’un de meilleur que soi. Mais en fin de compte, nous essayons tous de faire de la musique et d’exprimer notre âme.

PAN M 360 : Votre routine d’entraînement a-t-elle changé entre le début de votre carrière et aujourd’hui ? Si oui, à quoi ressemble ce changement ?

Marcus Printup : J’apprends de nouvelles choses tous les jours. En fait, ce que je fais le plus, ce sont les sons longs où je parfais mon son. Les sons longs m’aident à développer ma sonorité, à renforcer mon endurance, à obtenir une attaque solide et à améliorer ma tessiture, qui est basse, moyenne et haute.

J’ai beaucoup d’exercices de tonalité longue. Je fais aussi beaucoup d’exercices de langue pour garder ma langue forte, car c’est un muscle qui a besoin d’être utilisé et renforcé. Il en va de même pour les coins de mon embouchure. J’ai des exercices où je renforce les côtés de ma bouche. Les gens me voient faire cela en public et pensent que je suis fou ! Comme je l’ai dit précédemment, l’écoute est un élément essentiel de ma pratique. J’enseigne également beaucoup et je crois fermement qu’il est important de jouer avec mes élèves. Il est important pour moi de montrer à mes élèves que j’ai toujours envie d’apprendre et de progresser !

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Six ans et une pandémie après avoir présenté son dernier album, Pascale Picard revient en force avec son nouvel album aux mélodies accrocheuses Bigger Kids, Bigger Problems,  sorti le vendredi 4 avril dernier. Sur celui-ci, on retrouve dix chansons qui arrivent à point pour le printemps, remplies de soleil et de vent sur le visage.  Country-folk, basse funky, tonalités plus blues par moments… un beau sentiment de liberté et d’auto-affirmation se dégage de l’œuvre. On y passe par l’espoir de maintenir l’émotion bien vivante, par l’envie de s’émanciper, le besoin de dénoncer et la grâce du laisser-aller. Alors que les extraits Jaded , Your Jacket et Bigger Kids, Bigger Problems  tournent déjà depuis quelques mois avec leurs clips respectifs par le duo féminin Agrume Agrume, on a fait le tour des collaborations, des inspirations et des projets à venir de Pascale, qui sort également son premier roman cette année – La note de passage.

PAN M 360: Tu viens de dévoiler le deuxième single à la douceur printanière Your Jacket après avoir lancé Jaded. C’est vraiment une chanson remplie de lumière! D’où t’est venue l’inspiration?

Pascale Picard: Je me suis donné le défi de composer une chanson d’amour heureuse, en n’ayant pas peur que ça soit kétaine. Souvent, mes premières ébauches de chansons, les premières idées sont très simple et « catchy », et puis je me mets à réfléchir, j’ajoute des nouvelles suites d’accords et souvent, ça finit par tuer la magie. Pour Your Jacket  , j’ai choisi de cultiver le côté léger et de rester tout le long sur les mêmes trois accords. Le texte parle de la naissance d’une relation entre deux personnes, quand on sent qu’il y a quelque chose mais qu’on y va encore à tâtons.

PAN M 360: L’album a été réalisé par ton complice et bassiste Alexandre Lapointe. Comment avez-vous trouvé ensemble l’identité de l’album? 

Pascale Picard: Alex et moi nous étions croisés à plusieurs reprises et nous avions plein d’amis en commun, mais nous nous connaissions peu avant de commencer à travailler sur l’album. Je lui ai fait entendre mes chansons en version guitare-voix et ensuite, on a écouté de la musique pendant 2 jours, et parlé des influences à donner à chacune d’elle.  

PAN M 360: Qu’avais-tu envie d’explorer et de partager cette fois, à travers ces dix nouvelles chansons? 

Pascale Picard: J’avais envie de parler des questionnements et des constats qu’on fait  à la mi-parcours, quand on a l l’impression d’avoir atteint la plupart de nos buts. Prendre un moment pour voir si on est heureux où on est et réaffirmer, ou pas, ce dont on a envie pour la suite.  

PAN M 360: Dirais-tu que les longues pauses/périodes d’incubation entre tes albums sont des périodes de décantation nécessaires à ton processus créatif?

Pascale Picard: Pour avoir envie de composer et écrire des chansons, j’ai besoin de sentir que j’ai vécu des expériences et que j’ai des choses à dire. 

PAN M 360: Généralement, composes-tu plus à partir de la musique ou de la voix?

Pascale Picard: Je pars presque toujours avec la mélodie de la voix. Elle peut aussi venir à la guitare, au piano, parfois juste dans ma tête sans instrument. Et la mélodie porte souvent une intention ou une émotion qui m’inspire le thème de la chanson et des paroles.

PAN M 360: Tu parles de la vie qui évolue et qui change, de la capacité à s’en détacher aussi, avec les chapitres qui se terminent et les pages qui se tournent. Dirais-tu que tu avais un besoin de laisser-aller dans cet album? De lâcher prise?

Pascal Picard: Probablement, oui. Je l’ai fait à mon rythme, parce que j’en avais envie, sans aucune pression.  J’ai eu du plaisir tout au long du processus, tout s’est fait naturellement et simplement et je crois que ça s’entend.

PAN M 360: Tu as travaillé avec Charline Clavier et Daphnée Pageau d’Agrume Agrume pour les vidéoclips de chacun des extraits, est-ce que ça a été un coup de cœur?

Pascale Picard: Toute une révélation pour moi! Je connaissais déjà un peu leur travail grâce aux réseaux sociaux, mais la collaboration a été super fluide, naturelle et humaine. C’est une belle gang de la ville de Québec et j’ai pas le choix de dire que j’ai souvent un a priori positif à travailler avec des femmes. Le milieu de la musique que j’ai connu il y a 20 ans était très masculin et les occasions de travailler avec des femmes étaient plus rares. Ça fait du bien de voir que ça change pour le mieux.

PAN M 360: Comment dirais-tu que ton rapport à la musique a évolué, à travers ta carrière?

Pascale Picard: La musique a toujours été un besoin et une passion pour moi. Au début de la vingtaine, elle est devenue le moyen de payer les factures et j’ai réalisé que c’était parfois plus difficile d’entretenir mon amour pour elle quand j’étais « obligée d’en faire ». J’ai plusieurs fois trouvé d’autres moyens pour payer les comptes, parce que je sais que quand je prends une pause, la musique finit toujours par revenir. 

PAN M 360: Tu ajoutes en 2025 une nouvelle corde à ton arc avec la parution de ton premier roman de fiction. Comment ce nouveau projet a-t-il pris vie? 

Pascale Picard: C’est né de l’envie de créer par un autre moyen que la composition de chansons. Pendant la pause imposée au début de la pandémie, je me suis imposé la discipline  d’écrire tous les jours de 9h à 16h pendant 1 mois, sans toutefois avoir d’objectif clair en tête. Au terme de cette période, j’avais en main un beau fouillis d’environs 35 000 mots : c’était le premier jet de mon roman. 

PAN M 360: Qui dit nouveau disque dit nouvelle tournée. As-tu hâte de fouler de nouveau les scènes québécoises, une pandémie et six année écoulées depuis  The Beauty We’ve Found ? 
Pascale Picard: Nous avons monté le spectacle il y a deux semaines avec la formation qui partira avec moi sur la route, et j’ai vraiment hâte d’aller à la rencontre du public aussi bien entourée. C’est le réalisateur de l’album, Alex Lapointe, qui assure la direction musicale du spectacle et qui jouera la basse. Marie-Pierre Bellefeuille (claviers et chœurs) qui joue avec moi depuis 2018, Kenton Mail (batterie) et Endrick Tremblay (guitare) complèteront le band. Aussi, Endrick assurera toutes les premières parties en nous faisant découvrir les chansons de son projet Endrick and The Sandwiches.

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Lucas Debargue est pianiste de concert, mais aussi compositeur et de plus en plus connu en tant que libre penseur du jeu pianistique dont il choisit d’explorer l’univers tonal. Les libertés qu’il prend à interpréter les grandes œuvres lui valent les éloges de ses pairs (révélé par un 4ᵉ prix au Concours Tchaïkovski en 2015) mais aussi les foudres de critiques patentés, pas plus tard que cet hiver lors d’un récital donné à la Philharmonie de Paris. À l’évidence, le musicien français ne laisse personne indifférent. Alain Brunet l’avait interviewé une première fois à l’automne 2017 pour La Presse à la veille d’un récital donné à la Maison symphonique, Debargue revint jouer à Montréal en 2020 et le voilà de retour, cette fois à la salle Pierre-Mercure (dimanche 13 avril, 15h) pour un récital à la mesure de ses goûts et ambitions. Avant son arrivée au Québec, il nous fait la gracieuseté d’un long entretien pour la communauté PAN M 360.

PAN M 360 : Vous ne cadrez pas parfaitement avec l’idée qu’on se fait d’un pianiste de concert. On vous fait plaisir en affirmant cela?

Lucas Debargue : Oui absolument. Les artistes auxquels je m’attache sont ceux qui peuvent créer une singularité. Ce qui me motive à poursuivre ma voie, ce n’est pas une recherche de la singularité en tant que telle. Au fur et à mesure que je déroule cette pelote de mes recherches personnelles autour de l’interprétation et de la composition, y a beaucoup de choses qui viennent et que je veux  aussi exprimer par la parole et par l’écriture. J’écris énormément, je cherche à mettre en forme par un texte, au mieux d’un livre digne d’être partagé et servir à d’autres personnes. Cependant, il ne s’agit pas de donner mon avis, car on donne  aujourd’hui beaucoup trop d’importance aux opinions personnelles à mon avis. L’opinion personnelle n’est intéressante que si elle nourrit une réflexion. Si je pense quelque chose par rapport à une œuvre qui puisse amener des réponses, une réflexion, et me faire avancer aussi, alors là je partagerai. 

PAN M 360 : Vous vous opposez ainsi à tout discours péremptoire sur la qualité d’une œuvre et de son mode d’interprétation.

Lucas Debargue : Certains critiques en musique n’expriment que leurs normes sans expliquer, et cette façon exprimer ses opinions sans partage est répandue sur tous les réseaux sociaux de nos jours. Il vaut mieux nuancer et laisser place à l’incertitude, une des valeurs les plus importantes. En art, l’incertitude, c’est à peu près tout. Si on n’accepte pas que l’on sache peu de choses au départ, on est mal parti. Si on n’éprouve pas cet infini des possibles, ce vertige, on n’est pas interprète. Qu’est-ce que je vais croire et choisir en approfondissant une œuvre et comment je vais choisir une interprétation à partir d’éléments jugés solides, viables. C’est proche de la recherche. Je me suis passionné pour l’interprétation musicale après l’avoir fait pour la littérature et l’analyse de textes. Alors je ne crois pas que l’analyse d’une œuvre en réduit le plaisir de l’écouter; bien au contraire, elle l’augmente. Tout en assumant que le mystère d’une œuvre restera toujours entier, même si on en comprend de nouvelles dimensions. Idem en science : aucun scientifique ne vous dira comment fonctionne la vie! En musique, beaucoup de choses restent irrationnelles, mystérieuses, très difficiles à expliquer. Mais je crois que ce qui peut être expliqué doit l’être et ces explications doivent être partagées.

PAN M 360 : L’interprète doit-il alors aussi fournir des explications dans son approche de l’œuvre?

Lucas Debargue : La formation de l’interprète est curieusement organisée. On met l’accent sur le travail instrumental, l’approche de l’instrument, le doigté, l’exécution, etc. Mais du point de vue du développement de l’oreille, on s’arrête assez vite à un certain niveau où ça devient de l’écriture. Et comme on travaille sur un texte, ça devient difficile d’aller plus loin dans l’interprétation d’un texte sans soi-même être capable de produire un texte. Quand on fait de la rhétorique, c’est difficile d’incarner un texte si on n’est pas capable d’en produire un. Or en musique classique, l’interprétation et la composition sont deux circuits différents à emprunter. Si vous vous destinez à l’interprétation, vous n’atteindrez qu’un niveau faible dans la compréhension de la composition. Pour moi, au contraire, un interprète doit se rapprocher au maximum des compositeurs à partir de ce qu’ils nous ont laissé, d’abord la partition et autres éléments – biographiques, etc.. Il faut savoir plusieurs niveaux de lecture d’une partition. 

PAN M 360 : Soulignez-vous ainsi que les interprètes ne  s’en tiennent qu’à un seul niveau de lecture d’une partition?

Lucas Debargue : Si l’interprète n’est pas capable d’entrer dans les processus de composition, il y a un problème. Ça deviendra difficile de faire la part des choses entre la partition noire de notes et une information brute, soit la trame harmonique de la pièce qui guide les choses. La base d’une pièce est sa trame harmonique, la dominante, la tonique. Autre chose importante : la partition qu’on lit est le dernier degré de réalisation. Il faut alors remonter le temps, enlever différentes couches et trouver l’intrigue. L’intrigue, c’est l’harmonie, autour de laquelle il y a une orchestration du piano. »

PAN M 360 : Et vous laissez entendre que l’interprète n’est pas incité à faire cette démarche de rapprochement avec le compositeur. 

Lucas Debargue : Au début du 20e siècle, on avait encore Rachmaninov, Prokofiev, Medtner… Ça s’est arrêté dans la deuxième partie du 20e siècle, parce que vous avez eu une offensive moderniste très importante. Cette offensive est digne de mention dans l’histoire de la musique, mais elle a eu de graves conséquences, dont l’ultra-spécialisation. Un compositeur est devenu seulement un compositeur qui n’a plus de connexion avec la réalité instrumentale. Le compositeur se met à écrire des choses qui ne sont pas possibles à jouer sur un instrument. L’instrumentiste devient alors complètement déconnecté de la composition, jusqu’à devenir un serviteur, un exécutant soumis à la partition, sans regard critique.

Pour moi c’est un gros problème, c’est terrible et c’est complètement malhonnête de dire « moi je suis un humble interprète-serviteur de la musique ». Mais non, on ne peut pas se mettre comme ça en tant qu’interprète. Évidemment, il faut beaucoup de charisme sur scène pour incarner les œuvres; on se retrouve au centre à un moment, même si on n’est pas le compositeur. Or, au centre, on ne peut pas jouer l’humble serviteur. Vous n’imaginez pas un acteur dire « je suis l’humble serviteur de Shakespeare quand il joue Hamlet ». Non, il doit être Hamlet, sinon ça ne marche pas.

Et donc, il faut à la fois se rapprocher des compositeurs techniquement, en se rapprochant de l’écriture, en ayant davantage de connaissances et de maîtrise de ces éléments-là, et puis en prenant le rôle de l’interprète beaucoup plus au sérieux dans la place qu’il a dans la création d’une œuvre. L’œuvre reste muette quand l’interprète n’est pas là pour son emparer. 

Quand on joue du Beethoven, on fait équipe avec Beethoven, même si Beethoven n’est plus là, pour redonner, enfin, recréer une sonate de Beethoven pour le public. Et le but, c’est que ça soit un choc pour le public. Ce n’est pas de redonner encore, d’imiter la version d’untel ou d’untel. Ça doit être un choc.  

PAN M 360 : Parlons du programme de dimanche à Montréal : Fauré, Ravel, Scriabine et une œuvre de vous-même. Peut-être n’y a-t-il pas de raison justifiant ces choix de programme, mais posons quand même la question :  pourquoi jouer une œuvre composée par un pianiste qui n’a pas 30 ans en 2025, et d’autres  œuvres composées à la fin du 19e et au début du 20e, soit plus ou moins 125 ans avant l’époque actuelle?

Lucas Debargue : Superficiellement, je dirais que Ravel et Fauré avaient un lien dans leur vie puisque Ravel a suivi les classes de composition de Gabriel Fauré, pas pour très longtemps. Il a dit dans sa correspondance que Fauré lui a apporté beaucoup plus que des aspects techniques. 

Ravel a fait ça avec André Gedalge, son professeur d’harmonie et d’écriture, apparemment un génie en matière de pédagogie parce qu’il a aussi formé Darius Milhaud et plusieurs générations de compositeurs. Geldage était un esprit apparemment très très libre et qui arrivait à transmettre l’essentiel en matière de construction de pièces de musique, de logique, de composition, tout en respectant vraiment les individualités des compositeurs. C’est-à-dire qu’il n’était pas du tout comme des professeurs d’harmonie comme Théodore Dubois ou Ambroise Thomas, très raides sur ce que devait être l’harmonie. Gedalge était vraiment très ouvert d’esprit et Fauré l’était également, d’ailleurs beaucoup plus que son ami Saint-Saëns – 

bien sûr, Saint-Saëns est aussi un compositeur génial, mais je pense que le fait qu’il ait été très peu tolérant vis-à-vis de la modernité.

Ainsi, Ravel a dédié à Gabriel Fauré ses Jeux d’eau que je joue dans le programme de Montréal et je trouvais intéressant de les mettre ensemble. Ces deux hommes se connaissaient, qui étaient d’une génération différente –  Fauré était né en 1845 et Ravel en 1875.

Et c’était intéressant de voir la trajectoire d’un Fauré, donc là j’ai choisi cinq pièces de périodes différentes de la vie de Fauré, pour qu’on voit sa trajectoire d’un romantisme de salon assez familier vers une forme de modernité, la tonalité poussée dans ses derniers retranchements, des choses assez expérimentales, très dissonantes. Et les recherches d’un Ravel, lui a trouvé son langage très vite et finalement n’a plus trop évolué à partir de là. C’est-à-dire qu’il est dans les œuvres de la fin de sa vie, mais sa langue harmonique, avec certaines de ses premières pièces, et il y a certaines des caractéristiques du langage de Ravel dans les Jeux d’eau et dans la Sonatine qui font partie de ses premières grandes pièces pour piano.

Déjà pour moi c’était intéressant de mettre dans un même programme, dans deux parties différentes, une œuvre écrite à la même période, une sonate écrite à la même période, qui a des objectifs communs, des intentions communes de la part du compositeur, mais par des moyens différents, qui vont chercher par des moyens différents. La sonatine de Ravel est une sonate.

Une sonatine, c’est une sonate, mais c’est une sonate miniature. Et Ravel a écrit cette sonatine à un moment où Paul Dukas écrivait sa gigantesque sonate pour piano de 45 minutes, et où il y avait cette espèce de surenchère romantique ou post-romantique qu’on voyait dans les symphonies de Mahler par exemple. Chez Ravel, il y a eu très vite une volonté de passer à l’essentiel, moins de temps pour tout dire, aller vers la concision.

Et dans cette sonatine, il montre ça avec brio, parce que c’est vraiment une sonate, c’est même une sonate cyclique, avec les trois mouvements qui sont basés sur les mêmes matériaux thématiques. Tout ça est basé sur le même matériau thématique, on est dans un univers harmonique homogène, dans les trois mouvements et,  en 12 ou 13 minutes, tout est dit. 

PAN M 360 : Et que vient faire Scriabine dans le programme?

Lucas Debargue : J’aime bien mettre cette sonatine de Ravel dans le même programme que cette œuvre de Scriabine. Déjà, elles sont dans la même tonalité, (fa dièse et fa dièse mineur), et c’est intéressant de voir comment les deux compositeurs ont résolu les problèmes différemment. J’ai aussi fait ce choix parce que Scriabine aussi voulait écrire une sonate pour piano qui n’ait pas besoin de 40 ou 45 minutes pour tout dire. Donc il arrive à faire tenir sa sonate en 20 minutes, quatre mouvements. Ce qui est extraordinaire chez Scriabine, malgré cette brièveté, c’est qu’il arrive à donner à cette sonate une dimension symphonique, avec un parcours du premier mouvement au dernier mouvement, un parcours qui est vraiment symphonique et philosophique, métaphysique. Scriabine était très inspiré par Nietzsche, donc il y a cette philosophie là de cette transcendance par la souffrance, par les épreuves, d’arriver en fait à passer des ténèbres vers la lumière. Il y a toute cette espèce d’ésotérisme qui est là, et auquel Scriabine cherche déjà à donner des traductions musicales.

PAN M 360 : Entre, d’une part Fauré-Ravel, et de l’autre, Scriabine, il y a votre œuvre. Alors?

Lucas Debargue: C’était pour me sentir au chaud, d’être bien entouré. Ravel, Fauré et Scriabine font partie de mes influences, bien sûr. Et j’ai aussi, dans cette pièce, utilisé des éléments néo-baroques. Il y a un menuet, comme il y en a dans la sonatine de Ravel, il y a des danses, comme certaines des pièces de Fauré que je vais jouer. Derrière l’apparence d’une suite néo-baroque, d’un parcours, du début à la fin, il y a aussi des liens thématiques entre les cinq parties. Or, ce n’est pas ce qu’on a traditionnellement dans une suite de danses baroques, il n’y a pas forcément des motifs en commun. Là, toute ma suite est construite sur les mêmes matériaux et les mêmes tendances harmoniques. Il y a vraiment une progression de l’ouverture jusqu’à la gigue finale.

PAN M 360 : Au-delà de cette insertion, peut-on parler d’une thématique pour ce programme?

Lucas Debargue : C’était pour moi l’idée de mettre ma propre composition, ma première grande composition pour piano en plusieurs mouvements, au milieu d’œuvres qui partagent, c’est plutôt cette pièce de moi qui partage avec ces autres œuvres, le souci d’une espèce de transformation. C’est un programme qui pourrait s’appeler Transformation, parce que chez Fauré, c’est moins au sein des pièces qu’entre les pièces, où on peut mesurer tout le parcours qu’il y a entre le jeune Fauré et le Fauré de la fin, comment il a développé son langage harmonique. Et dans les autres pièces, c’est vraiment comment Ravel organise une forme sonate parfaite, à partir d’un même matériau thématique qui est transformé, varié de manière très subtile, et comment chez Scriabine, il y a vraiment cette quête de l’absolu, cette transformation.

PAN M 360 : Il y a 125 à 150 ans d’écart par rapport aux œuvres du répertoire que vous allez interpréter et la vôtre. C’est à dire que le piano, la musique, les concepts de l’harmonie, enfin tout a vraiment évolué au maximum depuis le début du 20e siècle jusqu’à maintenant, et vous vous inscrivez quand même dans une esthétique pianistique qui correspond à cette époque-là. Comment négociez-vous votre façon d’aborder le piano, la composition pianistique et l’époque actuelle dans laquelle vous vous trouvez? 

Lucas Debargue :  Je comprends ce que vous dites et en même temps… Je ne cherche pas à démontrer quelque chose idéologiquement quand j’écris de la musique; j’écris vraiment la musique que j’entends, la musique qui me vient. De mon côté, je reprends l’histoire là où elle s’est un peu arrêtée pour moi. Je fais ce qui me semble le plus sincère, le plus honnête et le plus excitant.

J’ai envie d’écrire une musique que j’aimerais découvrir moi-même comme pianiste. Je trouve trop d’excitation dans ce qu’on appelle la langue tonale, même ce qu’on appelle pour être plus précis la langue fonctionnelle.Ce qui compte ici, c’est ce qui me fascine: maîtriser la langue de Bach et de Ravel et de Chopin. C’est ça que je veux maîtriser. Beaucoup plus que la langue de compositeurs plus récents qui, pour moi,  parlent une autre langue. Je ne sais pas qui parle cette langue-là… pas moi en tout cas.

Programme

Saison Prodige – Lucas Debargue, piano

MAURICE RAVEL, Jeux D’eau, M.30

MAURICE RAVEL, Sonatine, M.40 

GABRIEL FAURÉ, Mazurka en si bémol majeur, op. 32

GABRIEL FAURÉ, Barcarolle no.9, op.101

GABRIEL FAURÉ, Nocturne no.12, op.107 

GABRIEL FAURÉ, Impromptu no.5, op. 102 

GABRIEL FAURÉ, Valse caprice no.4, op. 62

-ENTRACTE-

LUCAS DEBARGUE, Suite en ré mineur 

LUCAS DEBARGUE, Prélude 

LUCAS DEBARGUE, Pantomime 

LUCAS DEBARGUE, Sarabande 

LUCAS DEBARGUE, Menuet Guerrier 

LUCAS DEBARGUE, Gigue

ALEXANDRE SCRIABIN, Sonate no.3 en fa dièse mineur, op. 23.

BILLETS ET INFOS ICI

Après plusieurs années de silence, Laurence Hélie revient en pleine lumière avec un nouvel EP intitulé Tendresse et bienveillance — un titre évocateur qui résume bien l’état d’esprit de l’artiste. Celle qui s’était fait connaître au début des années 2010 avec deux albums de country-folk acclamés, avant de faire un virage indie sous le nom de Mirabelle, reprend aujourd’hui son nom d’origine. Un retour aux sources empreint de lucidité, d’émotion et de maturité.

Ses premiers albums intitulés Laurence Hélie (2011) et À présent le passé (2013) présentaient des sonorités country-folk alliés à la voix mélodieuse de l’artiste. Après ce deuxième album, Laurence s’est éloignée de la scène musicale pendant plusieurs années. Elle est réapparue en 2019 sous un nouveau nom : Mirabelle. Optant pour un son indie rock avec des accents folk, elle fait paraître l’album Late Bloomer (2020), suivi du EP Flickering Lights (2023) sous ce pseudonyme. 

Pour se recentrer, revenir à l’essentiel, et aller de l’avant, elle revient aujourd’hui à nous en tant que Laurence Hélie avec Tendresse et bienveillance, un titre illustrant plutôt bien dans quel esprit elle entreprend de se réconcilier avec sa propre histoire.

PAN M 360 a eu le plaisir de s’entretenir avec Laurence Hélie autour de la création de cet EP, de ses collaborations, de ses influences, et de ce que signifie pour elle ce nouveau chapitre. Une rencontre honnête, chaleureuse, tout en vulnérabilité, à l’image de sa musique.

PAN M 360: Bonjour Laurence, félicitations pour ton nouvel EP. Ça s’écoute très bien, je trouve durant un souper aux chandelles, ou en conduisant durant une journée grise.

Laurence Hélie: Merci 🙂 Je suis contente qu’on écoute ma musique lors de soupers aux chandelles. Très hot!

PAN M 360: Dans quel contexte as-tu créé cet EP?

Laurence Hélie:  J’ai de grands élans de musique qui durent quelques mois, pour ensuite se calmer et puis plus rien pendant un bout. Ces élans apparaissent souvent à l’automne. Je m’enferme avec ma guitare et un dictaphone – pour ne pas dire mon maudit cell que j’ai envie de lancer au bout de mes bras le 3/4 du temps – même si en même temps je ne pourrais pas passer une journée sans et c’est ce qui me fait halluciner! Désolée pour ce rant

Cette fois-ci, je n’avais pas trop de ligne conductrice pour débuter. J’étais dans une période assez sombre. J’étais constamment fatiguée. Certains médecins m’ont dit que j’avais sûrement la COVID longue. Je me demandais si je ne faisais pas une dépression. C’était pas vraiment fun et je pensais que toutes mes idées de chansons n’étaient pas terribles. J’ai donc envoyé tous mes bouts de tounes à Navet Confit. Et petit à petit il m’a aidée à construire les casse-têtes et un jour je me suis réveillée et j’avais 5 chansons que j’aimais! J’ai écrit tous les textes une fois les chansons enregistrées. C’était vraiment bizarre de travailler ainsi mais en même temps, les musiques m’ont vraiment full inspirée pour les textes.

PAN M 360: Pourquoi retourner au nom Laurence Hélie? Quelle est la différence entre ce projet et Mirabelle?

Laurence Hélie: Je ne sais pas trop. Au fond, y’a pas tant de différence sauf que je n’ai pas eu le choix de faire le projet Mirabelle pour me défaire de plein de nœuds que j’avais en tant que Laurence Hélie. Je n’aimais plus ce que je faisais, ou du moins, je me sentais prise, je n’avais pas confiance en moi et je ne pouvais plus avancer. Me donner un nouveau nom m’a permis d’explorer, de lâcher prise, et de me faire confiance à nouveau en tant que compositrice, en tant que musicienne, et en tant qu’autrice. C’est comme si je voulais rendre fière la Laurence ado et ses rêves de musique. Maintenant que je suis de retour sur la bonne voie, pourquoi ne pas reprendre mon nom? 🙂

PAN M 360: Comment c’était de travailler avec Karolane Carbonneau et Navet Confit? Comment ces collaborations ont vu le jour?

Laurence Hélie: Je n’arrivais pas à décider avec qui travailler à la réalisation. J’ai donc demandé à Navet Confit (un ami de longue date – on faisait de la musique ensemble au secondaire en Beauce!), Karolane Carbonneau (on s’est connues lorsqu’elle était au son pour mon show de Mirabelle au Lion d’Or en 2021 et ensuite elle a joué de la guitare et de la basse en spectacle avec moi) et Pierre-Guy Blanchard (on a fait deux chansons de noël ensemble avec Navet et ça a été le coup de foudre musical) s’ils aimeraient qu’on forme un genre de monstre dysfonctionnel à 4 têtes. Haha! 

Je sais que dans certaines situations, ça aurait pu être un échec cuisant, tous ces égos, toutes ces sensibilités différentes, mais dans notre cas, ça a été vraiment trop cool. Dès les premières prises, y’a vraiment eu une magie qui s’est installée. Franchement, j’y retournerais demain matin!

PAN M 360: Quelles sont tes influences pour ce EP? Pourrais-tu me nommer 2-3 chansons que tu as écoutées durant sa conception?

Laurence Hélie:  Y’a la toune Boys de Amen Dunes. J’adore ce mec. Je me sens comme full en sécurité quand j’écoute ses chansons. C’est bizarre ha!

J’ai écouté bien du Eric’s Trip parce que… roulement de tambour… j’étais quand même bien passée à côté jadis. C’est Pierre-Guy et Navet qui en ont longuement parlé lorsqu’on était en studio. C’était cool de découvrir quelque chose de nostalgique. Sinon, c’est très éclectique, Sinead O’Connor, Fugazi, SZA, Frank Ocean, Cat Power, Kendrick Lamar, Madlib et beaucoup d’Olivia Rodrigo et du Fredz (j’ai une fille de 9 ans haha!).

PAN M 360: Que représentent les mots Tendresse et bienveillance dans le contexte de ton Ep?

Laurence Hélie: C’est Navet, lors d’une session d’enregistrement qui nous a sorti cette phrase avant une prise: « tendresse et bienveillance les amis». On a parfois tendance à être durs avec nous-même en studio, les émotions à fleur de peau. C’est devenu notre mantra à Navet, Pier-Guy, Karolane et moi. Et c’est devenu le titre d’une chanson et du EP parce qu’effectivement, il en faut partout de la tendresse et de la bienveillance.

PAN M 360: À qui parles-tu dans la chanson Mes sympathies?

Laurence Hélie:  Je parle à une personne qui m’a fait du mal. Et j’ai mis des années à comprendre ce qui était arrivé. Et écrire ce texte m’a permis de panser mes plaies. De passer à autre chose.

PAN M 360: De quel jeu vidéo serait-il question dans Last Chance Lake?  Y a-t-il certains jeux vidéo avec lesquels tu es familière?

Laurence Hélie:  Haha, non! J’adorais Zelda quand j’étais jeune, mais ça me stresse trop les jeux vidéos. Je ne veux pas me faire subir plus d’angoisse que je n’en vis normalement tous les jours 😉 Je mentionne les jeux vidéos dans la chanson plus pour illustrer à quel point nous ne sommes presque plus jamais dans l’instant présent, synchrones avec les autres. Toujours un foutu device dans les mains (on revient à mon amour-haine du téléphone cellulaire).

PAN M 360: Qui fait le saxophone sur Last Chance Lake?

Laurence Hélie: CHRISTOPHE LAMARCHE-LEDOUX!!! Je voulais à tout prix réunir mes collaborateurs de l’époque Mirabelle sur le EP. Je savais que Christo jouait du saxo, mais j’étais loin de m’attendre à ce qu’il nous ponde ce solo de la mort qui tue! (Et y’a Warren Spicer qui chante avec moi sur  More Thrill

PAN M 360: Pour la plupart de tes projets, tu écris autant en français qu’en anglais. Y a-t-il une différence quant à la façon d’aborder l’écriture dans une langue vs l’autre? 

Laurence Hélie:  Souvent on dirait que le sujet impose sa langue. Mais j’adore les deux. Je ne voudrais pas avoir à choisir.

PAN M 360: Qu’est ce qu’on peut te souhaiter pour la suite de ton parcours de vie et dans la musique?

Laurence Hélie:  D’avoir la chance de pouvoir continuer. D’avoir la liberté au jour le jour de prendre le temps d’écrire. De garder cet espace mental malgré tout ce qui se passe autour. Dans le monde. Dans l’incertitude à grande et petite échelle. Tendresse et bienveillance les amis! 

PAN M 360 : Y a-t-il un lancement à surveiller et des spectacles prévus pour toi ce printemps et cet été ?

Laurence Hélie:  Je garde les doigts croisés, pour le moment je ne sais pas.

PAN M 360: Merci pour ton temps et à la prochaine j’espère 🙂

Laurence Hélie:  Merci pour les super questions! Ça a été un plaisir d’y répondre 🙂

Luciano Berio (1925-2003) est le premier nom italien qui vient en tête lorsqu’il est question de musique contemporaine de la seconde tranche du 20e siècle. Surtout pour sa musique instrumentale mais aussi pour ses explorations en territoire électroacoustique, Berio s’est taillé une réputation monumentale dans les avant-gardes institutionnelles, soit à travers ses résidences américaines, françaises, et italiennes il va sans dire. De 1947, année de son entrée dans la vie publique avec l’exécution d’une suite pour piano de son cru, à sa mort en 2003. Berio aura composé cinq quatuors à cordes superbement maîtrisés dans le cas qui nous occupe. Le Quatuor Molinari a mis le temps pour approfondir ces œuvres, les jouer devant public et finalement les enregistrer.  L’intégrale des quatuors à cordes a été rendue publique sous étiquette Atma Classique, profitons de cette sortie encore récente pour en causer à Olga Ranzenhofer, premier violon et directrice artistique du Molinari. L’entretien a été mené par Alain Brunet pour PAN M 360.

PAN M 360: Rappelez-nous l’historique du Molinari avec ces œuvres jouées devant public avant qu’elles fussent enregistrées.


Olga Ranzenhofer :
En effet, nous vivons avec ces œuvres depuis deux ans. Nous avons joué l’intégrale des cinq quatuors de Luciano Berio pour la première fois en mai 2023. Il est toujours bon de laisser dormir des œuvres puis de les reprendre. Nous les avons retravaillées au cours de l’été 2024, puis les avons jouées en concert à l’automne juste avant de les enregistrer. L’année 2025 est celle du centenaire du compositeur et nous allons refaire l’intégrale cette fois pour un important colloque qui se tiendra à l’université McGill en octobre prochain et intitulé Gestures, Words, Sounds: The Creative Worlds of Cathy Berberian and Luciano Berio. C’est vraiment satisfaisant de pouvoir rejouer ces chefs-d’œuvre plusieurs fois, car à chaque reprise on sent que notre interprétation prend de la maturité, on on devient de plus en plus à l’aise avec les quatuors.


PAN M 360 : Aux lendemains de la 2e Guerre mondiale les premières œuvres de Berio sont rendues publiques, son premier quatuor à cordes l’est en 1952 : Study. Où en était alors le compositeur associé encore aujourd’hui à cette vague de musique contemporaine de l’Après-Guerre?

Olga Ranzenhofer: Comme le laisse entendre le titre, c’est une œuvre de jeunesse, une étude. Écrite durant un stage d’été à Tanglewood en 1952, c’est celle d’un jeune compositeur dont la main est déjà sûre, mais qui n’a pas encore trouvé sa propre voix. On y retrouve les éléments d’une écriture classique du quatuor à cordes : mélodie accompagnée, imitations, homorythmie, richesse harmonique, contresujet, etc. Berio a dit de ce quatuor qu’il était même un peu empreint d’un esprit viennois.


PAN M 360: Quelles en sont les caractéristiques? Quels sont les enjeux de l’exécution?


Olga Ranzenhofer:  C’est une œuvre très délicate à jouer : certains nuances étant très douces, il faut trouver la bonne sonorité et une couleur transparente tandis que d’autres passages sont très forts et intenses et en homorythmies. Study est une œuvre courte et pleine de contrastes qui est très agréable à jouer et à entendre.


PAN M 360 : En 1956, était créé Quartetto per archi.  On peut qualifier cette musique de « sérialisme généralisé », qu’en dites-vous?  Comment cette œuvre est-elle construite Comment l’aborde le Molinari?


Olga Ranzenhofer: Quel chemin parcouru en quatre années depuis Study! C’est le système d’écriture qui domine sur la thématique dans cette œuvre. Je vois cette œuvre comme du Webern exposant 10! Comme dans la musique de Webern, chaque note est essentielle et revêt une importance primordiale. La caractéristique principale du sérialisme est que toutes les notes suivent un ordre prédéterminé, qui s’appelle une série. Dans cette œuvre, même les nuances suivent cette méthode. De plus, il n’y a pas d’hiérarchie, toutes les notes sont égales; au niveau des nuances, un ppp est aussi important qu’un fff !
Il y a tellement de paramètres à maîtriser dans une œuvre comme celle-ci : les notes, les rythmes, les nombreux changements de tempo, les articulations, les mode de jeu, les nuances, les vitesses de vibrato, etc. 

Pour réussir à dominer toutes ces informations, on doit commencer par beaucoup de travail personnel. Une des grandes difficultés est aussi de sentir les changements de tempo ensemble, en tant que quatuor. Pierre-Alain, notre violoncelliste nous a créé un «click-track», c’est-à-dire une piste métronomique incorporant tous les changements de vitesse. Ça été un outil essentiel pour pouvoir bien intégrer la rythmique changeante de l‘œuvre.
Lorsqu’on arrive à dominer tous les paramètres, la satisfaction et le plaisir sont très grands. Ça devient même enivrant!


PAN M 360 : En 1964, l’œuvre Sincronie voyait le jour. On dit de cette œuvre qu’elle est issue d’une période de « grande euphorie créatrice ». Au coeur des années 60, Berio était aussi parmi les pionniers de l’électroacoustique, sans toutefois délaisser la musique instrumentale. Comment « l’euphorie créatrice » a-t-elle fait son œuvre dans Sincronie? Quels sont les défis de cette œuvre pour chaque interprète du Molinari?


Olga Ranzenhofer: Il n’est plus question de mélodie ou d’harmonie dans cette œuvre. Tout ce qu’il reste des quatuors précédents ce sont les jeux de timbre très évolués de Quartetto per archi. La préoccupation première de Berio dans Sincronie est le geste. Cet élan est tantôt synchrone dans les 4 instruments, tantôt tous semblent évoluer dans des mondes différents.
Berio exprime très clairement la notion de synchronie : « les quatre participants élaborent la même séquence de blocs harmoniques en disant simultanément la même chose de manière différente ».
L’œuvre est divisée en de nombreuses sections contrastantes. Celles-ci sont parfois presque inaudibles, d’une grande douceur ou méditatives tandis que d’autres sont d’une violence extrême et très fortes.
Cette œuvre est probablement la plus difficile que le Molinari ait jouée. Techniquement, les défis de chaque instrumentiste sont énormes puis à cela s’ajoutent les rythmes complexes à jouer en homorythmie et tous les changements de tempo. Une fois ces défis maîtrisés, le résultat est très impressionnant.


PAN M 360 : En 1993, était créée Notturno (Quartetto III), une commande du Quatuor Alban Berg, dédiée au chef d’orchestre Lorin Maazel. On observe un écart de 29 ans entre cette œuvre et la précédente. Comment cela s’explique?


Olga Ranzenhofer: Pendant ces presque trente années entre Sincronie et Notturno, Berio a beaucoup écrit pour la voix. Même ses œuvres instrumentales deviennent plus vocales, plus expressives. Avec Notturno, son chef-d’œuvre pour quatuor, la voix est celle des victimes de l’Holocauste. En exergue de la partition, Berio cite Paul Celan, écrivain et survivant de cette horreur : « À vous la parole réduite au silence». Le quatuor fait entendre des chuchotements, des soupirs, des bribes de conversations étouffées ainsi que des cris et des affrontements dramatiques. Cette œuvre porte une grande charge émotive. Berio indique les caractères souhaités dans chaque nouvelle section : lontano e parlando, agitato, dolcemente e semplice, deciso, misterioso, obsessivo, immobile, sospeso, etc.
Les nuances extrêmes de pppp irriguent la partition tout comme les jeux de couleurs obtenues par le bariolage sur plusieurs cordes d’une même note créant ainsi un effet de fragilité. L’expression est au cœur de cette œuvre d’une grande beauté.


PAN M 360: En 1997 paraît Glosse. Quelles sont les différences formelles entre cette dernière partie de sa vie et celle des années 40-50-60? Comment cela se manifeste-t-il dans l’écriture de ce quatuor?

Olga Ranzenhofer: Le dernier quatuor de Berio est une pièce de concours. Il avait déjà mis sur papier des esquisses pour une nouvelle œuvre lorsqu’on lui a demandé d’écrire la pièce imposée pour le concours de quatuors à cordes Borciani. Il est donc parti de ses esquisses et les a assemblées sans chercher à créer des liens entre les différentes sections ou à créer une partition homogène et structurée. Bien évidemment, une pièce de concours comprend de grandes difficultés techniques et d’ensemble en plus de mettre en évidence les qualités de chaque instrumentiste du quatuor. Berio a dit de cette œuvre que c’était un commentaire sur un quatuor virtuel, une œuvre qui n’existe pas. On ne peut que sourire lorsqu’on pense qu’au moment d’écrire Glosse en 1997, nous n’étions qu’aux débuts de cette ère nouvelle où le virtuel est devenu omniprésent dans toutes les sphères de la vie quotidienne.

Fin mars, Ariane Moffatt sortait Airs de jeux contre toute attente. Vu la qualité évidente de l’offrande, qualité observée et ressentie, cet album surprise occupe une place de choix sur PAN M 360. Cette nouvelle matière sera d’ailleurs jouée sur scène très bientôt, et ce pour l’année qui suit. Avant quoi Ariane accorde cette interview à Félicité Couëlle-Brunet, riche conversation axée sur le jeu sous toutes ses facettes, dans une vie de création musicale et aussi dans une vie d’interaction avec les humains qui l’entourent, de ses enfants à ses collègues et à son public.

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AIRS DE JEUX SUR SCÈNE

Ariane sera accompagnée en spectacle par Fabienne Gilbert à la basse, Maxime Bellavance à la batterie et Guillaume Guilbault aux claviers et à la direction musicale. 

24 AVRIL 2025 | MINOTAURE | GATINEAU (COMPLET)

8 ET 9 MAI 2025 | BEAT & BETTERAVE | FRELIGHSBURG (COMPLET)

11 MAI 2025 | FESTIVAL SANTA TERESA | SAINTE-THÉRÈSE

23 MAI 2025 | LE ZARICOT | SAINT-HYACINTHE (COMPLET)

13 JUIN 2025 | FESTIVAL DE LA CHANSON | TADOUSSAC

29 JUIN 2025 | SCÈNE DU FLEUVE LOTO-QUÉBEC | TROIS-RIVIÈRES

4 JUILLET 2025 | CHAPITEAU QUÉBECOR | PETITE-VALLÉE

22 AOÛT 2025 | FESTIVAL SUPERFOLK | MORIN-HEIGHTS

11 OCTOBRE | POINTE-VALAINE | OTTERBURN PARK

16 OCTOBRE 2025 | CENTRE NATIONAL DES ARTS | OTTAWA

23 OCTOBRE 2025 | MTELUS | MONTRÉAL

25 OCTOBRE 2025 | IMPÉRIAL BELL | QUÉBEC

7 NOVEMBRE 2025 | THÉÂTRE GRANADA | SHERBROOKE

15 NOVEMBRE 2025 | THÉÂTRE BELCOURT | BAIE-DU-FÈBVRE

21 NOVEMBRE 2025 | LE CARRÉ 150 | VICTORIAVILLE

27 JANVIER 2026 | SALLE DESJARDINS | LA SARRE

28 JANVIER 2026 | THÉÂTRE TÉLÉBEC | VAL D’OR

29 JANVIER 2026 | THÉÂTRE DES ESKERS | AMOS

30 JANVIER 2026 | THÉÂTRE DU CUIVRE | ROUYN-NORANDA

31 JANVIER 2026 | THÉÂTRE DU RIFT | VILLE-MARIE

6 FÉVRIER 2026 | THÉÂTRE DE LA VILLE | LONGUEUIL

25 FÉVRIER 2026 | SALLE ANDRÉ-MATHIEU | LAVAL

26 FÉVRIER 2026 | SALLE ALBERT-DUMOUCHEL | VALLEYFIELD

27 FÉVRIER 2026 | THÉÂTRE HECTOR-CHARLAND | L’ASSOMPTION

13 MARS 2026 | THÉÂTRE LE PATRIOTE | SAINTE-AGATHE-DES-MONTS

14 MARS 2026 | THÉÂTRE DU VIEUX-SAINT-JEAN | SAINT-JEAN-SUR-RICHELIEU

20 MARS 2026 | L’ENTREPÔT | LACHINE

28 MARS 2026 | THÉÂTRE MANUVIE | BROSSARD

2 AVRIL 2026 | THÉÂTRE PALACE | JONQUIÈRE

4 AVRIL 2026 | PAVILLON DE L’ÎLE | CHÂTEAUGUAY

16 AVRIL 2026 | THÉÂTRE DU VIEUX TERREBONNE | TERREBONNE

Arion Orchestre Baroque accueille ce week-end le luthiste français Thomas Dunford, authentique virtuose du luth et chef invité. Citoyen français aux origines franc-américaines, Thomas Dunford est unique en son genre, en ce sens qu’il sait marier les musiques anciennes et baroques au répertoire moderne, des Beatles à Leonard Bernstein, en plus de composer et d’interpréter du matériel original de son cru. Le programme concocté pour les deux représentations à la Salle Bourgie couvre 4 siècles de musique occidentale, soit du luthiste et compositeur anglais John Dowland (1563-1626) à Berstein (1918-1990) en passant par Henry Purcell (1659-1695) et Georg Friedrich Handel (1685-1759). Éclaté, pensez-vous ? À vivre en temps réel avant de se prononcer, soit samedi 19h30 et dimanche, 14h30, à la Salle Bourgie. Pour un avant-goût, visionnez cette conversation avec le bassoniste et maestro Mathieu Lussier, directeur artistique d’Arion Orchestre Baroque interviewé par Alain Brunet.

INFOS ET BILLETS ICI

PROGRAMME:



John Dowland
« Come Again » tiré du First Book of Songs or Ayres
Lachrimae
King of Denmark’s Galliard
« Now, O, now, I needs must part » tiré du First Book of Songs or Ayres

Henry Purcell
The Fairy-Queen, Z.629 (extraits)
« When I am laid in earth » (Dido and Aeneas, Z. 626)

Georg Frideric Handel
Suite nº 4 in en ré mineur, HWV 437 (extraits)
« Guardian Angels » (The Triumph of Time and Truth, HWV 71)
« No, no I’ll take no less » (Semele, HWV 58)

Leonard Bernstein
West Side Story (extraits)

ARTISTES:

THOMAS DUNFORD:  luth et direction
MARIANNE LAMBERT soprano

Arion Orchestre Baroque

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