Un duo somme toute rarement vu a pris la scène hier soir à la Maison symphonique. La scène semblait étrangement vide, malgré le clavier imposant du Grand Orgue Pierre-Béique qui trônait en son centre. Le concert proposé était un voyage musical entre les époques en compagnie de Raúl Prieto Ramírez, organiste, et de Lucienne Renaudin Vary, trompettiste. Ces deux virtuoses ont offert des instants de musiques à couper le souffle tout au long de leur programme varié.
L’on s’imagine que peu d’œuvres ont été écrites spécifiquement pour le duo orgue et trompette. Mais la première pièce du programme, la Sonate pour trompette no. 1 en do majeur de Giovanni Buonaventura Viviani est un de ces rares exemples provenant de la période baroque. Les autres œuvres proposées, provenant surtout du répertoire vocal du tournant du XXe siècle, ont été arrangées pour ce duo, de manière assez convaincante. Deux pièces pour orgue solo complétaient le programme.
Lucienne Renaudin Vary a été irréprochable tout au long de la soirée. Le son clair et lyrique de la trompette emplissait parfaitement la salle. À son aise sur scène, on la voyait parfois tracer le contour des lignes mélodiques d’une main alors qu’elle jouait. De plus, le répertoire choisi permettait de constater ses talents dans plusieurs styles. Qu’il s’agisse d’une sonate baroque aux passages rapides et virtuoses, ou d’une pièce plus jazz aux nombreux ornements, la trompettiste semble toujours dans son élément. Les changements de ton sont toujours justes, les nuances bien dosées. Raúl Prieto Ramírez a également rendu justice au répertoire, et encore plus à l’instrument qu’il lui était donné de jouer ce soir-là. En tant qu’accompagnateur, les choix de jeux de l’organiste étaient toujours judicieux. C’est cet instrument qui donnait toute leur profondeur aux pièces : tantôt lumineuses, tantôt tendres, tantôt torturées et dramatiques.
Mais c’est surtout lors des deux pièces pour orgue solo que Prieto Ramírez a pu briller, et présenter au public toutes les possibilités sonores de l’instrument. Une transcription de la Valse de Méphisto no. 1 de Franz Liszt a semblé lui donner du fil à retordre au début, mais la virtuosité requise à l’interprétation de cette pièce a bien vite éclipsé ces détails. Cette œuvre, déjà monumentale dans le répertoire pianistique, prenait ici des proportions titanesques lorsqu’interprétée à l’orgue. Les extraits des Tableaux d’une exposition de Modeste Moussorgski ont également permis à l’orgue de voler la vedette. Le public a pu entendre à quel point l’orgue pouvait être polyvalent, tant par ses différentes sonorités que par ses nuances, et à quel point il faut être agile pour maîtriser cet instrument!
Ce duo rarement entendu et un programme bien construit auront permis de démontrer la virtuosité des deux interprètes et de mettre à jour toutes les possibilités musicales de l’orgue et de la trompette. Il s’agit là d’un concert réussi dont le souvenir n’est pas prêt de s’effacer!