L’ONJ a poursuivi sa saison de belle manière au Gesù, le vendredi 8 novembre dernier. Sous la direction de Miho Hazama, nommée aux Grammy Awards (que nous avons eu le plaisir d’interviewer ici à PAN M 360), l’ONJ a joué une soirée de musique mettant en valeur ses compositions, ainsi que celles d’autres femmes dont Maria Schneider et Christine Jensen. Dans le même esprit, plus de la moitié de l’orchestre de ce concert était composé de musiciennes, la plupart d’entre elles formant l’importante section des cordes.
Ces compositions illustrent la musique moderne pour orchestre de jazz dans toutes ses « couleurs ». J’utilise ici ce terme pour faire référence à toutes les considérations timbrales qui doivent être prises en compte lorsqu’on écrit pour un grand ensemble de jazz. Franchement, la quantité de combinaisons sonores disponibles (en particulier lorsque des cordes sont ajoutées) est énorme. Hazama a cependant fait des choix très agréables et d’autant plus intéressants.
Ses compétences en matière d’orchestration sont perceptibles dès le premier morceau. Sa composition Run commence par une utilisation intelligente d’harmoniques dans les cordes, ce qui crée un espace pour que les cuivres et la section rythmique fassent leur entrée. À certains moments, elle a choisi des cuivres plus doux, préférant un combo de bugle, cor et trombone à la place des trompettes. À d’autres moments, les saxophones ont été remplacés par la flûte et le hautbois.
Et à d’autres moments, des voix ont été ajoutées, celle de la talentueuse Sienna Dahlen qui a chanté sur plusieurs morceaux et a même offert au public un solo vocal qui a démontré sa capacité à utiliser des techniques vocales étendues. Jean-Pierre Zanella au saxophone soprano, Bill Mahar au bugle et Gentiane MG au piano se sont également distingués par leurs solos.
Mon seul véritable reproche est venu de l’écart rythmique occasionnel dans la section des cordes. Bien que ce ne soit pas trop flagrant, certains coups de poing étaient interprétés avec un groove légèrement différent de celui du reste du groupe et il semblait que tout le monde ne savait pas quand pousser ou tirer. On a même entendu une pauvre violoniste taper du pied avec détermination pour l’aider à jouer une section syncopée en pizzicato.
Cela dit, l’ensemble du groupe a réussi à jouer les figures de fond pendant le solo de batterie de Kevin Warren, et cette discordance de groove n’a donc pas été un problème à tout moment. Je soupçonne que le sens du temps solide comme le roc de la basse de Summer Kodama aurait pu aider à combler ce fossé rythmique puisqu’elle était, peut-être même poétiquement, située au milieu des cuivres, des cordes et de la section rythmique.
Au final, une soirée très réussie de jazz de chambre moderne et éclectique pour l’ONJ qui poursuit bellement sa programmation 24-25.