Il y a encore une semaine, je n’avais jamais entendu parler de Marcos Valle, pourtant fan finie de musica popular brasileira (MPB). Lorsque mon étudiante brésilienne m’en a parlé lors de notre dernier cours, et que mon boss m’a proposé de couvrir ce spectacle, ça m’a donné envie. Et c’est ce que j’ai fait jeudi soir, au théâtre Fairmount, le concert ne pouvant pas se tenir à la Tulipe pour les raisons qu’on sait.
Ce show tenu à guichets fermés a rassemblé une foule majoritairement brésilienne (dont une large part qu’on ne voit pas souvent aux concerts de la communauté locale) mais aussi bon nombre d’amateurs de musique brésilienne, issue de toutes les générations.
Marcos Valle était accompagné pour l’occasion par une formation complète – batterie/ percussions, basse, claviers, trompette. Assurément, le vétéran et ses collègues ont mis le feu au Fairmount,
Vêtu d’une chemise orange, cheveux longs, l’air post hippie du haut de ses 81 ans, il s’installe avec une certaine nonchalance devant l’un de ses deux claviers de la soirée et entame une chanson instrumentale bien rythmée, question de donner le ton de la soirée. Son phrasé au clavier est fluide et solide, dans le contexte de son œuvre. Il se lève par moments en plein milieu d’une chanson et se poste devant l’un des musiciens en le regardant dégainer son solo. Qui plus est, il conserve les atouts de son ancienne vie de chanteur de charme bossa nova.
« Je suis heureux d’être ici avec vous. Cette tournée américaine et canadienne, c’est pour célébrer mes 60 ans de carrière », nous partage l’octogénaire entre deux exécutions, avant d’entamer Cinzento, un morceau qu’il a composé avec le rappeur engagé Emicida.
Sa voix a pris un petit coup de vieux mais le chanteur parvient tout de même à tenir ses notes et à susurrer ses rimes comme lui seul sait le faire. Mais peut-on réellement demander la perfection à un octogénaire qui continue à remplir toutes les salles lors de son passage ?
Malgré les soucis techniques en début du spectacle, cela n’a pas déteint sur le reste de la soirée. Patricia Alvo, épouse et choriste de Marcos Valle, a également pu déployer son talent vocal… lorsque son micro fut mieux réglé par le sonorisateur.
Son hit Mentira a plu énormément à la foule, qui s’est empressée de sortir les cellulaires pour immortaliser le moment.
« Je suis ravi que la nouvelle génération continue d’écouter ma musique. Tout a commencé avec la prochaine chanson qui s’appelle Crickets Sing For Ana Maria », annonce-t-il. Nous avons eu alors droit à un long solo de batterie, suivi d’une version de Rocking you internally. Marcos Valle a également joué plusieurs morceaux de son récent album Túnel Acústico, tels que Feels so good et Toda Dia Santo (un de ses classiques repris dans cet album), qui a reçu un bel accueil du public.
Ainsi nous sommes passés du funk des années 60/70 au jazz groove avec des harmonies typiques de la musica popular brasileira, le tout exécuté sur fond de rythmes samba, jazz, disco, baião ou même batucada. En fin de programme Patricia Alvi s’est amusée à filmer la foule en liesse et les musiciens ravis, consciente que cette tournée internationale est peut-être parmi les dernières de ce grand artiste… qui affiche néanmoins une forme exemplaire !
Seule déception : nous n’avons pas eu le plaisir d’écouter Samba de Verão (Summer Samba), comme je l’espérais lors du rappel mais à la place, on a eu le morceau Bicicleta (Marcos serait un adepte de vélo) au sein de laquelle la trompette a occupé une grande place.
Une chose est sûre : c’est le rêve de tout artiste d’être encore sur scène à 81 ans et de faire des tournées aussi réussies que celle de Marcos Valle.