Les larmes et le feu des muses, voilà le titre évocateur d’un splendide concert du gambiste et maestro catalan Jordi Savall. Programme qui, dès les premières notes, a séduit un public attentif et respectueux.
En lever de rideau, nous avons été choyés par la belle interprétation d’une cantate de Samuel Scheidt, un contemporain de Claudio Monteverdi interprété de main de maître par l’ensemble Hespèrion XXI.
L’entrée en douceur de la troupe La Capella Reial de Catalunya fut un magnifique moment où les voix d’une soprano, d’une mezzo-soprano, d’un ténor, d’un baryton et d’une basse se mariaient parfaitement avec l’acoustique de la Maison Symphonique et nous plongeaient dans la Renaissance.
La suite fut tout aussi réussie avec la musique de John Dowland, Anthony Holborne. Mais, durant cette première partie d’un programme sans entracte, on pouvait sentir clairement l’influence de Monteverdi et le soin qu’a pris Jordi Savall de marier voix et violes.
Pas un seul temps mort dans cette célébration de la joie, de la peine et de l’amour !
Le jeu des interprètes était en général très bon, la présence sur scène du ténor Ferran Mitjans était tout simplement remarquable, j’ai aussi beaucoup apprécié Anna Piroli, magnifique soprano. Un moment fort de ce concert fut d’ailleurs, à mon avis, le duo avec Anna Piroli et le baryton Mauro Borgioni. Le seul bémol fut la présence de la mezzo-soprano que je trouvais un peu effacée.
La fin du programme fut marquée par une très longue ovation avec des bravos lancés de partout dans la salle.
Prenant la parole avant le rappel, Jordi Savall a souligné le plaisir qu’il avait de jouer dans cette magnifique salle avec un public si chaleureux. En anglais, il s’est dit triste de voir des jeunes mourir au lieu de faire de la musique dans le conflit au Moyen-Orient. Surtout qu’en ce 7 octobre, on soulignait le premier anniversaire de l’attaque du Hamas en Israël et la réplique israélienne aux attaques terroristes dans la Bande de Gaza.
Après d’autres applaudissements bien sentin, Jordi Savall nous a fait voyager un peu plus loin de l’Italie de Monteverdi. Il nous a même emmenés à Lima au Pérou en 1780, alors qu’un évêque ordonnait aux musiciens de recueillir tous les chants et danses observés autour de la cathédrale de la ville. Le résultat : deux chansons et danses exprimées dans une langue indigène inspirées de la Passion du Christ.
Ce fut une fin de concert formidable, qui m’a permis d’apprécier le talent de Savall à la viole de gambe et celui de ses gambistes acolytes d’Hespèrion, sans compter les voix superbes de la troupe La Capella Reial De Catalunya.
Photo : Adam Mlynello