Qui a dit que le slam n’avait pas sa place sur LA plus grande scène extérieure des Francos ? Grand Corps Malade a prouvé vendredi soir qu’il est possible de faire du slam, de la poésie, du chant même par moments, et offrir un concert digne d’une rock star.
Sur la même scène que Tiken Jah Fakoly quelques jours plus tôt, celui qui a élu domicile dans notre métropole la dernière année a su charmer son public par ses mots et ainsi rassemblé plusieurs dizaines de milliers d’amoureux de la langue française. Accompagné pour l’occasion par plusieurs instruments : trombone, trompette, violoncelle, guitare, piano et batterie, l’homme de plus 2 mètres surplombait la place des arts, apparaissant sous divers jeux de lumière. Il a d’ailleurs débuté son concert avec « J’ai vu la lumière », avant d’enchainer avec « La sagesse », puis « Saint-Denis ».
Par moments, on n’entendait rien dans la foule, un silence de mort et seule la voix de GCM résonnait. Le public était pendu à ses lèvres, et buvait chaque parole.
Chaque morceau était unique et l’orchestration impeccable : sur certains la trompette servait d’introduction alors que sur d’autres, tous les musiciens débutaient en même temps, donnant une atmosphère festive à ce qui allait suivre. Le jeu d’éclairage avait toute sa place et enveloppait chaque chanson de manière originale.
J’ai particulièrement aimé « Roméo Kiff Juliette » où l’on voit clairement le talent de storyteller de l’artiste. Il sait raconter des histoires et selon le couplet, la musique suit fluidement, plus intense quand l’action est mise en avant, et plus douce au début et à la fin de la pièce.
Il prend le temps de s’adresser au public, sans se presser, surtout lorsqu’il parle de ses enfants et de leur réaction après l’écoute de son plus récent album.
Après « 2083 » qui est un peu intense en termes de rythme, il retourne vers la douceur avec
« Retiens tes rêves » où slam et chant cohabitent, sur fond de violoncelle. On aperçoit même des ombres de danseuses durant le morceau, ce qui rajoute une autre dimension au spectacle. D’ailleurs, ce procédé d’ombrages a également été utilisé pour le morceau hommage à Aznavour, « A chacun sa Bohème », qu’il a repris à sa manière.
Mais le moment le plus fort à mon goût a été durant son duo avec Camille Lellouche, qui apparaissait que sur écran, « Mais je t’aime ». Je l’ai découverte récemment grâce à mon fils. D’ailleurs, une festivalière française qui était tout près de moi et mes fils connaissait toutes les paroles par cœur et semblait ravie de voir son compatriote en spectacle.
Deux surprises sont venues agrémenter la soirée : la première, lorsqu’Emma Peters est venue sur scène pour chanter « Sauf quand je pense à toi » alors qu’elle venait de terminer son propre concert au Club Soda. Autre surprise : MCO, le plus jeune des rappeurs, qui est monté sur scène pour « C’est moi qui écris mes textes » et qui a drôlement un air de famille avec Grand Corps Malade. Est-ce son fils ? On s’en doute mais il ne le confirme pas.
Le public a apprécié « Montréal » puisque tout le monde autour de moi avait un sourire aux lèvres durant ce morceau écrit en 2009, dans un café de Montréal.
Il n’aurait pas pu terminer sans jouer « Mesdames », ce morceau dans lequel il rend hommage à la gente féminine. Mais c’est avec « Deauville » que le concert exceptionnel des événements spéciaux des Francos 2025 a pris fin, nous laissant avec une lueur d’espoir dans ce monde de brutes où poésie et slam ont toujours leur place.
Crédit photo: Victor Diaz Lamich