Mercredi soir, l’OSM offrait à la Maison symphonique un petit cadeau au public omnivore montréalais. Une perle (aussi tragique soit-elle) du répertoire cinématographique, amplifiée et mise en valeur musicalement par un orchestre dont la qualité n’est plus à douter.
Le Dictateur, sorti en 1940, est un bijou de son genre. Le premier film réellement parlé de Charlie Chaplin présente une attention minutieuse à l’esthétique sonore, telle qu’on le retrouvait dans Les temps modernes quatre ans plus tôt, et une chorégraphie exemplaire qui fait la force de Chaplin. Le film se présente presque comme un ballet, évoquant autant la grâce que la misère humaine. La scène du globe terrestre est marquante dans cette optique. Il est nécessaire de remettre en contexte le film, qui a été réalisé bien avant que l’on saisisse l’horreur de la Seconde Guerre mondiale, mais on ne peut s’empêcher de sourire et de rire face à cet humour si universel et si bien dosé.
Il est certain que la présence d’un orchestre comme l’OSM pour réaliser la trame sonore a bonifié, ou plutôt enluminé l’expérience. C’est avec clarté et fidélité au matériel original que les musiciens, sous la gouverne de Timothy Brock, ont accompagné le public. Les cuivres étaient en demande, étant donné le caractère militaire de nombreuses scènes, et ont été parfaits. Ils ont même par moment su extirper quelques rires par eux-mêmes. Les cordes quant à elles, très nombreuses (surtout pour les contrebasses), ont assuré la fondation de l’orchestre et la réalisation des émotions plus douces et sombres, à l’écran.
La musique du film n’a certainement pas la même ambition ou l’envergure d’une symphonie mahlérienne, mais démontre des qualités certaines qui sont à saluer, et à applaudir! Il s’agit d’une musique qui regorge d’humour et de fraîcheur. Malgré un aspect très fonctionnel (la musique est un outil dramatique par essence), on se plaît à observer comment la partition sert à accentuer les gags ou les émotions, tant dans la tristesse que dans la joie, ou encore dans la confusion et dans l’espoir. En effet, on remarque l’utilisation fréquente de leitmotivs.
Charlie Chaplin a lui-même dit avoir amèrement regretté d’avoir fait ce film après que les atrocités des camps de concentration aient été révélées au monde en 1945. Il ne s’agissait plus, selon lui, d’un sujet dont on pouvait rire. Sa présence dans le contexte actuel est également troublante. Le film a beaucoup d’échos avec la situation actuelle, voire trop d’échos. On ne peut critiquer l’OSM d’avoir programmé cette œuvre, ne sachant ce qui allait se passer, mais on peut saluer l’organisation de l’avoir conservée, avec son message surtout optimiste et humaniste. Un réconfort apprécié.
Le ciné-concert est représenté ce jeudi soir à 19h30, et d’autres ciné-concerts sont offert durant la saison de l’OSM. Pour plus de détails, consultez la page des concerts à venir ICI.