Nuits d’Afrique | Sousou et Maher Cissoko : l’amour, de la kora et par la kora
Elle est suédoise, formée à la flûte, au violon et au piano, avant de prendre la guitare et, surtout, la kora. Pour elle, c’est une passion acquise. Il est Sénégalais, et vient d’une longue et prestigieuse lignée de griots mandingues. La kora et le chant, c’est dans son sang. Pour lui, c’est inné et tout simplement la vie, quoi. Le couple dans la vie comme en musique sera de passage (pour la troisième fois) au Festival international Nuits d’Afrique le 17 juillet, au Club Balattou. J’aurais voulu parler avec les deux ensemble, mais la connexion avec Maher n’a pas été possible, ce qui fait que c’est Sousou qui m’a accordé l’essentiel de l’entrevue, que voici.
Pan M 360 : Le plus récent album, Made of Music, remonte à 2018. C’est un long moment…
Sousou : En effet, ça fait longtemps. Il y a eu la pandémie, bien entendu, mais ce n’est pas vraiment une excuse. Disons que nous avons un peu dévié de notre course habituelle, et nous avons développé d’autres projets. De plus, ce n’est pas chose aisée de faire un album. Ça demande beaucoup d’efforts, mais surtout de l’argent. En plus, nous avons beaucoup tourné, ce qui est très bien, évidemment, mais bon, ça a pris de notre temps. Cela dit, nous avons plusieurs chansons qui sont écrites, mais nous attendons d’être prêt.
Pan M 360 : Prêt pour quoi exactement?
Sousou : À le produire. Nous souhaitons apporter un nouveau son à notre style, quelque chose de plus électro. Pour ça, il faut une bonne dose de production studio, ce que nous souhaitons faire le plus possible nous-mêmes. Nous avons donc mis pas mal de temps sur l’apprentissage de la chose, et l’investissement dans le matériel requis, chez nous en Suède.
Pan M 360 : L’histoire commence à être connue, mais ça vaut la peine de la répéter : comment êtes-vous entré en contact avec la kora?
Sousou : J’étais très jeune, et mon père, musicien folk, faisait parfois des concerts de musiques croisées et invitait des musiciens à la maison. L’un d’eux était un griot de la Gambie. Il jouait de la kora. Il venait nous voir chaque année. Quand j’ai eu 17 ans, nous sommes allés en Gambie, le visiter, et je me suis dit que j’aimerais bien, avant des études ‘’sérieuses’’, prendre une année pour apprendre cet instrument là-bas. Finalement, je n’ai jamais quitté ce chemin.
Pan M 360 : Comment vous accueille-t-on là-bas, en tant que femme blanche occidentale?
Sousou : En tant que femme occidentale, j’ai été très chaleureusement accueillie. Je dirais même, ironiquement, que c’est probablement plus facile pour une femme blanche de l’Ouest que pour une femme du pays. Là-bas, les femmes sont supposées prendre soin des enfants, s’occuper des tâches ménagères, etc. Alors, pour elles, apprendre la musique et surtout la pratiquer, c’est assez difficile. C’est un exemple patent du privilège dont je bénéficie, mais qui est injuste pour les femmes africaines.
Pan M 360 : Pourriez-vous amorcer une nouvelle lignée de griots, féminins, blancs et occidentaux?
Sousou : Je pense que ce serait insensible de ma part d’oser poser ce genre de geste, et m’approprier une culture qui est inscrite dans le sang, et dans les siècles. Je pourrai pratiquer l’art que j’ai appris, mais le transmettre comme eux le font de générations en générations, non. Mon mari, Maher, peut le faire. Nous avons deux enfants, de 11 et 17 ans, et pour l’instant, ça ne les intéresse pas tellement. Occasionnellement, on les invite à chanter avec nous. Le résultat est très bon, mais leurs intérêts sont ailleurs en ce moment…
Pan M 360 : Vous jouerez au Balattou, quelles impressions gardez-vous de l’endroit?
Sousou : Un endroit très intime, où les gens sont très collés! C’est très plaisant d’y jouer.
Pan M 360 : En plus des chansons de vos albums existants, aurons-nous quelques nouvelles chansons?
Sousou : Oui, probablement. On pourra en jouer quelques unes, afin de tester l’effet sur le public.