Après 12 semaines d’activités intenses, tant par ses concerts que ses divers stages de perfectionnement pour jeunes musiciens, le Festival international du Domaine Forget et son académie de formation tourneront la page sur leur édition de 2024 demain, le 24 août. Présentée en collaboration avec le Palazzetto Bru Zane, cette prestation réunira sur scène les Violons du Roy et l’ensemble à vents Pentaèdre avec l’Orchestre de chambre du Domaine ainsi qu’une distribution de chanteurs et chanteuses stagiaires de l’Académie, dirigée par Mathieu Lussier, Jean-Marie Zeitouni et NicolasEllis. Un concert festif placé sous le signe du plaisir!

À la barre du festival depuis les deux dernières années, Mathieu Lussier a discuté avec Alexandre Villemaire du programme de cette dernière soirée et d’un aperçu de ce à quoi l’on peut s’attendre pour la saison prochaine.

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1 drop 1000 years du Québécois Martin Messier s’inspire du système de circulation thermohaline, engendrée sur notre planète par les différences de densité des eaux de mer liées à leur température ou à leur teneur en sel. Ainsi, une goutte d’eau prendrait environ 1000 ans pour faire un tour entier du globe. L’eau est donc au centre de cette performance et son créateur explique à Alain Brunet comment ce régulier de MUTEK, renommé créateur en performance audiovisuelle immersive, en a imaginé le flux sur scène, devant public. Sa performance est prévue, le samedi 24 août au Théâtre Maisonneuve, 19h, dans le cadre de MUTEK 2024 et du volet 2 de sa série A/Visions.

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ÈBONY, composé du Montréalais Jordan Gardner et du Torontois R-ODERICK, fusionne la Detroit Techno et la Chicago House, enrichie de nombreux genres et sous-genres allant du Footwork au Soca en passant par le Jump Up. Leur EP Real Truth les a placés en bonne place sur la scène de la musique électronique. Leur premier concert, qui célèbre leur premier album intitulé Union, est l’expression d’une musique globale porteuse de récits culturels issus de l’expérience noire. C’est exactement la raison pour laquelle Alain Brunet les a rencontrés dans le cadre de cette interview vidéo de PAN M 360.

EBONY SE PRODUIT À L’ ESPLANADE TRANQUILLE, VENDREDI 23 AOÛT | INFOS ICI

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CIEL est une artiste aux multiples facettes, dont les racines s’étendent de la Chine au Canada, où elle est devenue une figure clé de la scène électronique. Copropriétaire du label de musique électronique torontois Parallel Minds, elle est également membre du collectif de femmes & LGBTQIA+ DJ Discwoman, de renommée internationale. Et elle a une émission de radio mensuelle en résidence sur Rinse FM à Londres depuis 2018. Ciel se produira à Mutek jeudi dans le cadre de la série Nocturne, présentant et adaptant pour le live la musique de son album Homesick. Salima Bouaraour a conversé avec elle sur son processus créatif, sur la version sur scène de sa musique Homesick live set up.

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Orchestroll est un curieux duo de musique électronique ambiante et expérimentale formé par le partenariat musical entre les producteurs Jesse Osborne-Lanthier et Asaël Richard-Robitaille. La musique est tantôt lente et ondulatoire, tantôt maniaque, et toujours imprévisible. C’est un peu comme si vous étiez sur des montagnes russes sans jamais atteindre le sommet ou la chute. Les deux albums du duo – Hyperwide Lustre et Tintinnabulation ChXss (une collaboration avec Feu-St-Antoine au festival Suoni Per Il Popolo) – sont des entités uniques faites pour être explorées en live.

Nous nous sommes entretenus avec le duo Orchestroll avant leur performance à MUTEK, à propos de leurs origines, de leur récente résidence à Stockholm et de leur fascination pour les psychédéliques.

PAN M 360 : Comment Orchestroll a-t-il vu le jour ?

ORCHESTROLL: Par la force des choses. On est bons amis et collaborateurs de longue date. Depuis des années, nous rêvions de créer un projet qui nous appartienne entièrement, sans être soumis aux contraintes ou influences extérieures. Nous voulions un espace d’expérimentation où nous pourrions explorer et développer nos idées les plus intimes, un canevas sur lequel nous pouvions exprimer les affinités, les sujets et les concepts qui nourrissent notre relation artistique et amicale. Orchestroll est également une sorte de projet pluridimensionnel, un espace où nous recyclons des idées musicales esquissées lors de productions pour d’autres artistes, des idées que nous estimions ne pas avoir pleinement exploitées. Ce projet a mûri pendant environ cinq ans avant d’être enfin dévoilé au public.

PAN M 360: Comment s’est déroulée l’expérience de la résidence EMS à Stockholm ?

ORCHESTROLL: L’expérience de la résidence EMS à Stockholm a été brève, mais extrêmement intense et productive. Nous sommes arrivés à Stockholm autour du solstice d’été, pendant le phénomène du soleil de minuit, après un périple d’environ 20 heures. Nos rythmes de sommeil étaient complètement déréglés par la combinaison d’un long voyage et de la lumière incessante du jour qui ne se couche jamais. Nous dormions dans une sorte de grenier, avec peu de protection contre la lumière et les chants d’oiseaux constants, résultant en des journées étranges et interminables au studio. Nous faisions des siestes de quelques heures avant de nous enfermer dans un studio sans fenêtres toute la journée, pour ensuite ressortir « la nuit, » désorientés, et découvrir le soleil toujours brillant comme en plein après-midi. Cela dit, ce cadre a été extrêmement stimulant sur le plan créatif. Nous avons eu la chance de collaborer avec un ami de longue date, l’artiste visuel et musicien « Visio » Nicolas Tirabasso, qui était également en résidence. Nous avons enregistré du matériel pour plusieurs albums en cours de préparation. De plus, nous avons eu l’incroyable opportunité de travailler avec le Halldorophone, un instrument rare qui était au studio EMS depuis un an. Par un heureux hasard, nous sommes arrivés la veille de son départ, ce qui nous a permis de l’utiliser pendant une journée.

PAN M 360: Votre musique a quelque chose de surréaliste et d’hypnotique. Pouvez-vous nous en parler ?

ORCHESTROLL: Nous aimons créer des pièces qui provoquent des états sensoriels intenses, des expériences auxquelles nous aimerions aussi être confrontés en tant que public. Nous sommes attirés par la coexistence d’éléments qui, à première vue, ne devraient pas nécessairement se rencontrer, ce qui crée une sensation de déstabilisation. Certains des moments musicaux les plus intéressants et révélateurs, pour nous en tant qu’auditeurs, sont ceux qui nous ont laissés perplexes quant à leur création, nous poussant à nous interroger sur le comment et le pourquoi d’un tel son ou d’une telle musique. Nous cherchons à recréer ce genre d’expérience pour les autres. Cependant, il est également essentiel pour nous de créer une porte d’entrée à notre musique, un élément qui capte immédiatement l’attention, ce qui peut expliquer le côté hypnotique de nos compositions. Nous voulons que notre musique soit à la fois accrocheuse et profonde, des « earworms » qui s’enracinent et résonnent durablement chez l’auditeur.

PAN M 360: Comment nommez-vous vos chansons ? 

ORCHESTROLL: Il existe de nombreuses façons dont nos titres de chansons prennent forme, mais un aspect demeure essentiel : le titre doit évoquer quelque chose de stimulant, en lien direct avec le ressenti spécifique de la pièce. Parfois, c’est narratif, parfois esthétique, descriptif ou même politique, mais c’est toujours empreint de ludisme. Les titres s’inscrivent clairement dans la tradition du ‘’naming convention’’ des albums solo de Jesse; mais cette fois-ci, ils sont peut-être infusés d’une esthétique ou d’un sens partagé entre les deux membres du projet. Nous parlons souvent de worldbuilding, et il est crucial pour nous qu’un certain folklore se dégage, non seulement à travers la musique, mais aussi dans les visuels et le concept global.

PAN M 360: Comment se déroule un concert ? Y a-t-il beaucoup d’improvisation ?

ORCHESTROLL: Les performances live d’Orchestroll sont profondément adaptables, évoluant en fonction du lieu, du matériel disponible, du cadre et du territoire sonore que nous choisissons d’explorer. Nos spectacles ont eu lieu dans une variété d’endroits—des salles de concert, des clubs, des églises, des warehouses, et des galeries—chaque environnement apportant une atmosphère unique à la performance. La nature de nos performances est variée et imprévisible. Certains concerts adoptent une approche électronique, ancrée dans la musique expérimentale ou rythmique et/ou “dance”, tandis que d’autres sont plus improvisés, mettant l’accent sur de l’instrumentation live, les configurations de band, et des éléments rituels. Ces performances impliquent souvent des musiciens invités et sont accompagnées de visuels immersifs et d’une scénographie élaborée. En plus de jouer en duo, nous élargissons souvent notre formation en trio lors de collaborations avec Daniele Guerrini (Heith). Ensemble, nous créons des interprétations hybrides des compositions de Heith et d’Orchestroll, ainsi que des œuvres collaboratives, fusionnant nos sons distincts en quelque chose de difficile à démêler, voire insaisissable.

PAN M 360: Dans quelle mesure l’utilisation de drogues psychédéliques joue-t-elle un rôle dans l’écriture de vos rythmes ? Je pose la question parce que l’album Tintinnabulation ChXss avec Feu St-Antoine a été pressé sur des feuilles de LSD ?

ORCHESTROLL: Nous ne sommes pas étrangers aux drogues psychédéliques, et ce serait mentir de prétendre que nos perceptions et notre appréciation de la musique n’ont pas été influencées ou transformées par des expériences psychotropes. Ces expériences ont indéniablement élargi notre compréhension de la musique, nous ouvrant à des dimensions sonores et émotionnelles autrement inaccessibles. Lorsque nous composons, nous le faisons généralement dans un état de sobriété ou un peu stoned. Notre objectif est souvent d’atteindre ou de recréer cet état de conscience élargie, non pas par l’usage direct de substances, mais par la puissance évocatrice du son lui-même.

Nous voyons la musique comme un véhicule capable de transporter l’auditeur vers ces états altérés de manière naturelle, en jouant sur les textures, les rythmes et les ambiances. L’album Tintinnabulation ChXss, est en quelque sorte un clin d’œil à ces influences, mais aussi une manière de célébrer le potentiel transformatif de l’art sonore. On cherche à créer des compositions qui, même sans drogues, puissent évoquer cette sensation de transcendance, où la musique devient un pont vers des mondes intérieurs inexplorés.

Orchestroll plays live during MUTEK’s Nocturne 5 – TICKETS HERE

L’équipe de PAN M 360 sillonne l’entière programmation de MUTEK 2024 et en observe un maximum d’artistes au cours de cette 25e édition de sa version montréalaise. Suivez nos expert.e.s jusqu’à dimanche soir, aucune autre couverture médiatique de MUTEK ne s’annonce aussi considérable!

Film Scores for No One s’inspire du matériel instrumental que Patrick Watson a produit au cours des cinq dernières années. Pendant la pandémie, il avait offert un concert de musique électronique dans le contexte de MUTEK, mais cette fois-ci, c’est plus important. En trio, aucune forme chanson ne sera prévue, mais plutôt de la musique abstraite pour synthétiseurs modulaires et jouée en temps réel, à travers un set plus ambitieux, déployé dans une grande salle – New City Gas, mercredi, 21h.

Fondées sur les synthétiseurs modulaires personnalisés à la sauce Pat Watson, ces nouvelles pièces se rapprochent de ses motivations premières en musique, soit la composition de paysages sonores instrumentaux ou électroniques, pour des orchestres ou des films. C’est donc une excellente raison d’assister à ce concert partagé avec Kara Lis Coverdale et Colin Stetson. C’est aussi une excellente raison de regarder l’interview de Patrick Watson par Alain Brunet.

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Drew Hemment est un créateur de festivals et un universitaire qui possède des décennies d’expérience dans le secteur culturel. Il a fondé le célèbre Future Everything Festival au Royaume-Uni en 1995, qui est devenu une référence mondiale en matière d’innovation dans les arts et la technologie. Il est actuellement directeur du Festival Futures à l’Edinburgh Future Institute, où il continue à repousser les limites de ce que les festivals peuvent réaliser. En outre, il dirige le projet New Real et occupe un poste de professeur dans le domaine des arts et de la société des données, tout en collaborant avec l’Alan Turing Institute. PAN M 360 a rencontré Hemment juste après sa conférence d’ouverture du Future Festivals Summit, lançant officiellement le MUTEK Forum 2024. 

PAN M 360 : Pouvez-vous nous expliquer ce que sont le Festival Futures et l’Edinburgh Future Institute ?

Drew Hemment : Oui, bien sûr. Je m’intéresse principalement à l’étude des festivals de deux manières différentes. Tout d’abord, je m’intéresse aux festivals du futur, c’est-à-dire ceux qui concernent l’avenir et qui sont aussi ceux de l’avenir. Je réfléchis aux changements que connaissent les festivals, à la manière dont nous pouvons soutenir leur résilience et à la manière dont nous pouvons défendre les festivals en tant qu’espaces créatifs extraordinaires, comme nous savons tous qu’ils peuvent l’être. Je considère également les festivals comme un moyen de penser et de créer l’avenir. Tout comme certaines personnes créent des films pour explorer des futurs spéculatifs, je vois les festivals comme un espace pour explorer, tester et expérimenter des idées qui peuvent nous aider à relever les défis d’aujourd’hui et à orienter les trajectoires vers les types de futurs que nous aimerions voir.

PAN M 360 : La question peut paraître simple, mais comment définissez-vous un festival ? Qu’est-ce qu’un festival pour vous ?

Drew Hemment : C’est une très bonne question. Pour moi, un festival n’est pas seulement une question de mécanique, comme les systèmes de billetterie. Il ne s’agit pas non plus des indicateurs que les bailleurs de fonds pourraient comptabiliser, comme le nombre de chambres d’hôtel réservées par les visiteurs du festival. Ces éléments ne définissent pas l’importance d’un festival. Pour moi, un festival est une idée, une communauté de personnes, un mouvement. C’est quelque chose de si important que nous devons le faire. Voilà ce qu’est un festival pour moi.

Lorsque je parle de festivals, je fais principalement référence à ceux qui sont interdisciplinaires et engagés dans le changement social – et non aux grands festivals d’entreprise axés sur les grands groupes et les scènes gigantesques. Nous assistons actuellement à une polarisation où les géants commerciaux dominent, laissant les festivals plus petits et plus innovants lutter pour leur survie. Je crois passionnément que les festivals sont l’avenir, mais nous devons nous battre pour cet avenir. 

PAN M 360 : Dans un réseau international comme les Festivals du Futur, nous imaginons que de nombreux participants sont confrontés à des défis similaires. Cependant, y a-t-il des problèmes qui sont particulièrement locaux ou spécifiques à certaines régions ?

Drew Hemment : Absolument. Malheureusement, il est communément admis que les choses deviennent plus difficiles, en particulier avec les climats politiques actuels, tels que la montée du populisme de droite, le néolibéralisme et l’état corrosif du capitalisme. Ces facteurs rendent difficile la création d’organisations et d’événements nourrissants et bienveillants, et la durabilité devient un défi majeur. Si de nombreux défis sont communs, il existe également des problèmes uniques et localisés. Par exemple, dans certaines régions, il est urgent de discuter des connaissances indigènes. Les différentes régions du monde sont confrontées à des contextes sociaux et politiques distincts, et les organisateurs de festivals y répondent de diverses manières. Leur implication dans les questions liées aux mouvements artistiques, à la technologie, à la démocratie ou à d’autres domaines varie également. Ainsi, bien qu’il y ait des thèmes communs, chaque festival et ses organisateurs sont uniques, avec leurs propres défis et intérêts locaux.

PAN M 360 : Quelle est l’importance des types de pratiques artistiques présentées dans le cadre d’un festival ?

Drew Hemment : J’aime travailler à travers et entre les frontières. Je suis musicien de formation, mais j’ai toujours été intéressé par le changement social et l’activisme social. J’ai toujours été impliqué dans la technologie et la culture numérique, à la fois comme outil et comme sujet – quelque chose qui peut être troublant ou inspirant. Au cours de ma carrière, j’ai évolué entre la musique électronique, les nouveaux médias et l’art numérique. Ce qui m’enthousiasme le plus, ce sont les festivals qui accueillent l’inattendu et sont ouverts à de nombreuses expressions artistiques différentes.

PAN M 360 : Vous organisez des festivals depuis longtemps. Comment votre expérience en tant que créateur de festivals s’accorde-t-elle avec la méthodologie que vous avez développée pour étudier les festivals ?

Drew Hemment : Il ne s’agit pas seulement d’étudier les festivals, mais aussi de les créer. D’une certaine manière, j’aborde les festivals comme des projets artistiques. J’ai travaillé dans le domaine du design et je crois au pouvoir du partage de ce que l’on fait et de la manière dont on le fait. Le design permet de trouver des moyens de documenter, de réfléchir, d’évaluer et d’améliorer les méthodes et les outils que l’on utilise. J’ai développé « Festival as Lab » comme une méthodologie de conception pour développer des festivals, en particulier ceux qui sont engagés dans le changement social et le développement technologique. Il s’agit de savoir comment, en tant que créateurs de festivals, nous pouvons servir d’intermédiaires entre différentes personnes, disciplines et secteurs. Cette méthodologie a été adoptée par un réseau international de festivals, dont MUTEK, et a eu une influence internationale. Je crois en son pouvoir d’améliorer ce que nous faisons et de nous permettre de nous développer et de mieux partager notre travail.

PAN M 360 : Quel rôle pensez-vous que l’intelligence artificielle (IA) jouera dans l’avenir des festivals ?

Drew Hemment : L’IA est fascinante en tant que technologie et domaine scientifique, mais elle soulève également de nombreux défis éthiques. Avec la montée en puissance des modèles de langage et des algorithmes, le monde dans lequel nous vivons et celui dans lequel nous organisons des festivals sont en train de changer radicalement. Les festivals doivent naviguer dans cet environnement, en trouvant de nouvelles façons de s’engager avec les artistes et les publics tout en proposant des alternatives. Les festivals sont puissants parce qu’ils rassemblent les gens face à face, en sortant des bulles de filtre et en favorisant des conversations réelles, parfois difficiles, qui peuvent conduire à des changements radicaux et inspirer des œuvres d’art puissantes.

PAN M 360 : Enfin, que pensez-vous de l’idée que certains festivals ne sont pas faits pour durer éternellement ?

Drew Hemment : Je suis un cas d’école en la matière. J’ai créé un festival en 1995 et je l’ai dirigé pendant 25 ans, mais j’ai atteint un point où j’ai senti que le festival était arrivé à sa fin naturelle. J’ai abandonné la formule du festival et je l’ai confiée à un nouveau directeur créatif. L’organisation a désormais un programme qui s’étend sur toute l’année. Ma décision n’est pas due au fait que je ne crois plus aux festivals, mais au fait que ma passion m’a amené à explorer comment les méthodes de travail que j’avais développées dans les festivals pouvaient être appliquées dans d’autres domaines. Ce n’est donc pas que le festival a pris fin, mais que de nouvelles portes se sont ouvertes, et je n’ai pas pu résister à l’envie de les franchir.

L’idée qu’un festival ait une durée de vie naturelle est séduisante. Je trouve magnifique qu’un festival naisse et rassemble une communauté pendant un certain temps, puis que les gens laissent tomber. Il peut s’agir d’un autre type de don, qui crée un espace pour que d’autres puissent venir et créer leurs propres rassemblements et festivals. Cependant, il y a aussi le défi de soutenir les festivals, surtout dans le climat actuel. Je ne sais pas ce qu’il en est à Montréal, mais au Royaume-Uni et dans de nombreuses régions du monde, les petites salles et les festivals sont soumis à une forte pression. Il est essentiel que nous nous soutenions mutuellement pour que ces espaces continuent à prospérer tout en veillant à notre bien-être et à celui de la communauté.

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Par où commencer ? Jordan GCZ est un nom qui résonne sur la scène de la musique électronique depuis des décennies. Depuis ses débuts en 1999 avec Optisimo (Fact Records), la carrière de Jordan a été marquée par sa capacité à glisser sans effort entre des paysages sonores house, deep house, ambient et infusés de jazz, ainsi que par une série impressionnante de réalisations. Son amour profond pour la techno de Détroit a été une force directrice, menant à des collaborations avec des pionniers comme Terrence Dixon et des remixes de Robert Hood. Le natif de l’Ohio est également connu pour ses projets collaboratifs, notamment Juju & Jordash avec Gal Aner et Magic Mountain High, avec Move D dans le mélange. Vous les avez peut-être vus à MUTEK respectivement en 2013 et 2014.

Le jazz a toujours eu une influence significative sur le travail de Jordan, influençant profondément ses processus de création et de performance, qui sont presque entièrement ancrés dans l’improvisation. Après avoir passé les 20 dernières années à construire sa carrière à Amsterdam, le producteur s’est récemment installé à Toronto. Ce qui nous amène à MUTEK Montréal, où il jouera en direct le mardi 20 août, à l’Esplanade Tranquille, après Duchesse et avant Mathew Jonson. A ne pas manquer.

PAN M 360 : Quel genre de musique avez-vous écouté pendant votre enfance ?

Jordan GCZ : Je suivais religieusement les charts pop britanniques. J’aimais beaucoup la pop, l’électro pop, ce qui était très courant comme Duran Duran, Pet Shop Boys. J’étais vraiment obsédé. J’étais l’un de ces enfants qui avaient un Walkman sur l’oreille toute la journée. J’ai eu la chance de grandir dans les années 80, je suis sûr qu’à un certain niveau, le fait d’entendre autant de synthétiseurs très tôt m’a donné envie de me lancer dans la musique de synthétiseurs et la musique électronique.

PAN M 360 : Quelle a été la première scène musicale à laquelle vous vous souvenez avoir participé en allant à des concerts, en achetant des cassettes ou des disques ?

Jordan GCZ : Au début de mon adolescence, j’étais plus intéressé par le punk et l’industriel. J’aimais beaucoup Bauhaus, puis j’ai commencé à m’intéresser à des trucs plus américains. J’aimais Sonic Youth, même Skinny Puppy, The Cure… J’étais l’un de ces adolescents gothiques et dépressifs. Je sortais pour écouter ce genre de musique, mais j’ai toujours aimé les synthétiseurs et j’ai joué des claviers dans un groupe.

PAN M 360 : Comment es-tu passé du statut de membre d’un groupe à celui de producteur et à ton propre parcours ?

Jordan GCZ : La technologie y est pour beaucoup. J’ai eu mon premier synthétiseur à l’âge de 13 ans, et peu après, j’ai acheté un magnétophone quatre pistes. Je n’ai jamais vraiment aimé faire partie d’un groupe, j’ai toujours voulu faire mon propre truc. Une fois que j’ai eu l’enregistreur, j’ai pu commencer à faire ma propre musique. À l’âge de 16 ou 17 ans, j’avais quelques synthétiseurs et j’ai commencé à rassembler d’autres équipements. J’ai également commencé à utiliser un ordinateur pour enregistrer de la musique, ce qui m’a ouvert encore plus de possibilités. J’aimais aussi beaucoup le jazz, ce qui est un peu différent, mais tout s’est mis en place pour moi.

PAN M 360 : Il est fascinant de constater que l’essor des home studios a permis à tant de gens de créer de la musique. Quel impact cela a-t-il eu sur votre approche de la musique ?

Jordan GCZ : La possibilité de faire de la musique à la maison a changé la donne. Vers 18 ans, j’ai découvert la techno américaine de Détroit et la house music de Chicago. Je suis tombé amoureux des éléments jazzy de la techno de Détroit – elle contenait les éléments bruts et rythmiques de la musique industrielle que j’aimais déjà, combinés à la musicalité du jazz. C’était le genre parfait pour moi à l’époque. J’ai commencé à faire de la musique de danse qui intégrait ces influences. J’ai eu la chance que le moment soit bien choisi et que cela corresponde parfaitement à ce que j’aimais.

PAN M 360 : Vous avez vécu à Amsterdam pendant assez longtemps.

Jordan GCZ : J’ai passé environ 19 ans à Amsterdam, et pendant cette période, mon projet le plus réussi a été Juju & Jordash avec mon partenaire Gal. Nous vivions tous les deux à Amsterdam, et la plupart des concerts que j’ai donnés l’ont été avec lui. Nous nous consacrions entièrement à la musique, à l’enregistrement d’albums et aux tournées presque tous les week-ends. Nous avons développé notre propre style, et l’improvisation y a joué un rôle important. C’est une chose sur laquelle je continue à me concentrer dans mon travail en solo.

PAN M 360 : L’improvisation est un élément central de votre travail. Comment l’abordez-vous lorsque vous travaillez seul ou avec quelqu’un d’autre ?

Jordan GCZ : Improviser seul est définitivement différent d’improviser avec quelqu’un d’autre. Lorsque vous êtes avec une autre personne, vous échangez des idées et réagissez l’un à l’autre, ce qui rend les choses plus faciles d’une certaine manière. Mais lorsqu’on est seul, on doit réagir à soi-même, ce qui peut être plus difficile. Mon processus en studio est similaire à ce que je fais sur scène. Il s’agit de partir de rien et de voir où la musique me mène. La principale différence est qu’en studio, je peux rester longtemps sur une idée jusqu’à ce qu’elle se transforme en quelque chose de cohérent. Sur scène, je dois faire avancer les choses plus rapidement pour maintenir l’attention du public.

PAN M 360 : On dirait que vous passez beaucoup de temps à préparer vos improvisations. Quelle est votre approche de cette préparation ?

Jordan GCZ : Il est important pour moi de connaître mes instruments sur le bout des doigts. Ma configuration a évolué au fil des ans, mais elle est restée plus ou moins la même depuis que j’ai commencé. J’utilise une technologie très ancienne – des synthétiseurs et des boîtes à rythmes des années 80. J’utilise des séquenceurs qui font partie des instruments, un synthétiseur monophonique avec un petit séquenceur monophonique, un autre synthétiseur polyphonique avec un petit séquenceur polyphonique. J’ai besoin de me sentir en confiance pour pouvoir me concentrer sur la musique. Je ne veux pas passer mon temps à résoudre des problèmes techniques pendant que je joue. Mon énergie créatrice doit aller à la musique, pas à la réparation du matériel.

PAN M 360 : Comment gérez-vous les situations où votre matériel ne fonctionne pas ou lorsque vous devez utiliser du matériel inconnu ?

Jordan GCZ : Ces situations peuvent être stressantes, mais elles donnent aussi des résultats intéressants. J’ai eu des concerts où tout allait de travers avec le matériel, mais d’une manière ou d’une autre, nous avons réussi à nous en sortir. L’un de mes albums préférés est né d’un concert où tout le matériel a cessé de fonctionner et où nous avons dû demander à des gens sur Internet de nous apporter des synthétiseurs. C’était éprouvant, mais ça a fini par marcher. Lorsque je joue seul, j’ai vraiment besoin d’une installation fiable. L’année dernière, j’étais censé jouer avec Terrence Dixon, mais il est tombé malade et j’ai dû me produire seul avec un minimum de matériel. J’ai donc dû me produire seul avec un minimum de matériel. C’était une expérience formidable parce que je connaissais suffisamment bien mon matériel pour le faire fonctionner.

PAN M 360 : Vous avez récemment déménagé au Canada. Qu’est-ce qui a motivé cette décision et comment trouvez-vous la scène musicale ici ?

Jordan GCZ : Mon partenaire et moi vivions à Amsterdam pour ma carrière, mais pendant la pandémie, nous avons réalisé que nous ne voulions plus être liés à ce mode de vie. Mon partenaire est originaire du New Jersey et j’ai découvert que, ma mère étant canadienne, je l’étais aussi. Cela nous a donné la possibilité de déménager ici. Nous avons visité Toronto et nous avons adoré. C’était agréable de vivre enfin dans la même ville que sa famille après 20 ans. En ce qui concerne la scène musicale, je n’ai pas encore été trop impliqué. J’ai été DJ à quelques reprises, mais je n’ai jamais joué en direct ici. Nous verrons ce qu’il en est après ma prestation à Mutek.

PAN M 360 : Que pensez-vous de l’avenir de votre carrière musicale ?

Jordan GCZ : Je suis toujours passionné par la musique, mais je traverse une sorte de crise de la quarantaine, j’essaie de savoir ce que je veux faire ensuite. La musique reste mon principal centre d’intérêt, avec mon chien, mais je dois décider comment je veux en vivre. J’ai commencé à produire d’autres artistes, ce qui me plaît, mais je pourrais finir par faire un peu de tout : jouer, produire, enseigner. Nous verrons où cela me mènera.

PAN M 360 : Vous parlez de la diversification des sources de revenus, et j’ai découvert que vous aviez créé une page Patreon pendant la pandémie. Comment cette expérience s’est-elle déroulée pour vous ?

Jordan GCZ : J’ai créé une page Patreon pendant la pandémie pour enseigner aux producteurs et proposer des jams de studio aux abonnés. C’était un bon moyen de rester en contact avec les gens et de les aider à développer leur talent. Mais l’année dernière, j’ai été moins actif sur cette page et j’envisage de la fermer. Enseigner est formidable, mais maintenant que je peux le faire en personne, je ne sais pas si je vais continuer avec Patreon.

PAN M 360 : Je vous pose la question parce que je suis également doctorant en études numériques et en sociomusicologie et que j’étudie les effets de plateformes comme Patreon sur la relation entre les artistes et les fans.

Jordan GCZ : Patreon offre un lien plus personnel avec les fans, ce qui est bien. C’est un prolongement des médias sociaux, mais il est plus ciblé car il ne s’adresse qu’aux abonnés. Les gens se sentent investis, et je me sens plus proche d’eux qu’avec les médias sociaux classiques. C’est vraiment intéressant, mais comme tout, il y a des avantages et des inconvénients.

PAN M 360 : Que pensez-vous de l’état actuel de la scène dance music ?

Jordan GCZ : Pour être honnête, la scène de la dance music a toujours eu ses défauts, mais j’ai l’impression qu’elle a empiré au cours des cinq dernières années. Il n’y a plus beaucoup de place pour l’art dans la musique de danse de nos jours. La plupart des festivals et des clubs privilégient le succès commercial au détriment de la créativité. On a l’impression qu’il s’agit plus d’avoir du succès et d’être populaire que d’être authentique. Il existe encore des endroits comme Mutek qui encouragent la créativité, mais ils sont rares.

PAN M 360 : Ne pensez-vous pas que l’augmentation du nombre de clubs qui appliquent une politique de non-utilisation du téléphone sur le dancefloor est un pas dans la bonne direction ?

Jordan GCZ : Je pense que c’est un pas dans la bonne direction, mais je suis un peu cynique. Beaucoup de clubs utilisent la politique du non-téléphone comme un outil de marketing plutôt que d’essayer réellement d’améliorer l’expérience. Ils ne vous surprennent pas au club en vous disant « Écoutez, nous n’avons pas de politique d’interdiction de téléphoner ». C’est plutôt comme s’ils allaient sur Instagram et disaient « Nous n’autorisons plus les téléphones à l’intérieur, venez nous donner votre argent ». Peut-être qu’ils le font maintenant parce que c’est à la mode, mais dans un an, ils diront : « OK, écoutez, nous pouvons ramener nos téléphones ».

PAN M 360 : Vous avez dit que MUTEK était l’un des rares endroits où la créativité est encouragée : que pouvons-nous attendre de votre performance ?

Jordan GCZ : Je suis très enthousiaste à l’idée de jouer cette musique. L’année dernière, depuis que j’ai déménagé au Canada, et surtout après la pandémie, je me suis demandé si j’avais encore envie de me produire dans des boîtes de nuit. Je vieillis et la pandémie a changé beaucoup de choses pour moi. MUTEK m’a semblé être l’occasion idéale d’explorer ce que je ressens à l’idée de me produire à nouveau, de savoir si j’ai envie de retourner à cette vie, et si oui, quel genre de musique je veux créer. Ce concert me donne la chance d’expérimenter et de voir où cela me mène.

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De France, le Fakir Trio inscrit les mélodies traditionnelles marocaines dans une musique instrumentale actualisée par le jazz et autres influences occidentales. En seconde partie de programme, le virtuose du ney, un instrument à vent typique de l’Afrique du Nord, Rachid Zeroual et son groupe se joignent au trio hôte afin de conférer à cette rencontre l’inspiration des rythmes gnawas, de la musique hmadcha et plus encore. Leader de cet événement, le violoniste et compositeur Marwan Fakir explique à Alain Brunet et usagers de PAN M 360 cette rencontre entre Afrique du Nord et Occident.

Le concert du Fakir Trio et Rachid Zeroual a lieu ce samedi 17 août, 15h, Cinquième salle de la PdA

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Composé des musiciennes Amélie Lamontagne et Ana Drobac (violons), Nayiri Piloyan (alto) et Sophie Coderre (violoncelle), le Quatuor Rhapsodie est un ensemble qui se caractérise par la versatilité et l’accessibilité de son répertoire ainsi que pour le dynamisme de leur interprétation. Allant de la musique folklorique en passant par le classique et le populaire, ces quatre amies mettent en valeur leurs coups de cœur musicaux de même que la musique issue de leur héritage culturel. Dans le cadre de la Virée classique 2024, le quatuor donnera deux concerts gratuits en après-midi, le samedi 17 août et le dimanche 18 août, à l’Espace George-Émile Lapalme où la musique arménienne, sous toutes ses formes et ses influences, sera mise de l’avant. À la veille de leurs prestations, Alexandre Villemaire s’est entretenu avec Nayiri Piloyan pour discuter de leur programme et de leur participation à la Virée.

PROGRAMMES PAYANTS OU GRATUITS, C’EST ICI!

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Miloš Karadaglić est l’un des guitaristes classiques les plus convoités au monde et un véritable ami du maestro Rafael Payare. Avec l’Orchestre symphonique de Montréal et en solo, il interprète le grand Concierto de Aranjuez de Joaquín Rodrigo, le samedi 17 août, à 20 h, à la Maison symphonique. Pour un second programme intitulé Souvenirs d’Espagne, il est seul le dimanche 18 à 13h30 à la 5e Salle de la PdA, puis il joue en solo des pièces d’Isaac Albéniz, Francisco Tárrega, Heitor Villa-Lobos et Mathias Duplessy. Alain Brunet l’a rencontré entre deux répétitions.

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Fondé par le chef de chœur et clarinettiste Xavier Brossard-Ménard, l’ensemble vocal Les Rugissants évolue dans le paysage musical montréalais depuis sept ans en proposant au public des performances riches en contenus et en découvertes musicales. Avec leur programme recherché allant du classique à la musique folklorique en passant par le populaire, l’ensemble se démarque aussi par une approche engagée et multidisciplinaire.

Dans le cadre de la Virée classique, Les Rugissants présenteront à l’Esplanade Tranquille leur concert Voces de España qui met à l’honneur la musique espagnole avec comme œuvres principales les Romancero Gitano de Mario Castelnuovo-Tedesco et la Suite Lorca d’Einojuhani Rautavaara auxquelles se joindront des pièces de Manuel Oltra le tout accompagné à la guitare par Marc-Étienne Leclerc et la danseuse de flamenco Marie-Andrée Cloutier.

Alexandre Villemaire a discuté avec Xavier Brossard-Ménard de ce programme et de sa conception.

  

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