Sur Modulation, Sef Lemelin rassemble les pièces qui lui ont été les plus significatives parmi celles qu’il a jouées sur sa tournée 600 Times Digital Tour, diffusée en Live Stream d’octobre à décembre 2020. Lemelin décrit ses compositions comme étant inspirées par la détresse de notre isolement collectif et de ce regard obligé face à nous-mêmes. En effet, la plupart des pièces reposent sur un brouillard sonore évoquant l’expérience d’un dérèglement quelconque. Au sens figuré, vu la puissance des pièces et les textures sonores choisies, ce dérèglement pourrait nous sembler météorologique. Il y a heureusement des moments d’apaisement par la présence de guitares langoureuses de style americana et de sons venteux, brillants, cristallins, suggérant le merveilleux et les vastes espaces. Passionné par l’équipement lui permettant de transformer le son, Lemelin nous en offre sous toutes ses formes. En voici une idée : sur Schematic, un vrombissement de sons émule l’accélération et la décélération, générant un sentiment trouble qui reviendra de façon diffuse pendant l’écoute de l’album. Sur Courtage, des sons de percussions de type métallophone rappellent le gamelan et une guitare planante libère l’énergie d’une tempête. D’autres sons texturés et cordes soutenues apparaissent sur fond de bourdonnement, et une douceur s’installe alors que des boucles se courtisent à l’aide d’une mélodie simple et hypnotique. Puis, sur la pièce Oscillation, une nappe sonore majestueuse aux textures aériennes et guitares crépitantes semble se déployer sans fin du sol au ciel. Tandis que l’on passe d’une pièce à l’autre, on repère un motif : les guitares amples et déchirantes, les boucles accrocheuses, les nappes sonores en mouvement. On oscille entre tension et soulagement sur ce périple créé en des temps étranges.
