En ce bas monde, il est de ces voix si pures qu’à leur écoute, on se dirait physiquement nettoyé par la quintessence des savons du monde. Ces ruisseaux libèrent la saleté que l’on ne savait même pas qu’on avait, leurs effluves contribuant à l’équilibre interne. Ragnar Zolberg, de son vrai nom Ragnar Sólberg Rafnsson, force de la nature et électron libre en provenance d’Islande, possède une voix de ce type.
Faisant suite à l’explosif et tribal Sonr Ravns, Rog II se fait plus posé. Les cris de guerre de Zolberg laissent place à des pièces introspectives favorisant le piano et la guitare, sans aucune percussion. Créer ces chansons a été sa thérapie contre l’anxiété et la dépression, et on ne peut que saluer son initiative de regarder ses démons droit dans les yeux. C’est un album sombre, mélancolique, où fleurit magnifiquement un givre élaboré de tristesse.
I Carry On est si lourde et noire qu’on dirait que Zolberg trempe ses mains dans la mélasse et nous en enduit. The Other Side of the Floor, nous pend par les pieds, relatant des souvenirs d’ivresse malsains. On a droit à une pièce en islandais, Að Ljósinu, bijou d’un autre monde qui enserre le cœur durci, rappelant Kuolema tekee taiteilijan de Nightwish. De multiples frottements et craquements ajoutent à l’atmosphère tantôt feutrée, tantôt étouffante. Car si cet album est le témoignage d’un être qui s’enlève une à une les épines de la peau, on contemple également un état d’esprit où règne désormais l’ordre et la netteté. Une renaissance.
Puisque la musique capture les souvenirs à travers ses vibrations, lors des futures écoutes de cet album en différentes saisons, on se remémorera cette fin d’année 2020, où l’espoir se dépose tranquillement dans l’âme comme une fine neige transcendant toute notion de chaos.
