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Gayance (Aisha Vertus) au FME : joie de vivre jusqu’au bout des doigts

Interview réalisé par Isabelle Marceau

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Fanatique de danse depuis sa jeunesse, passionnée de vinyles dont la collection est enviée, Aïsha Vertus alias DJ Gayance fait danser les gens partout où elle passe. Montréalaise établie à Bruxelles depuis quelques années, elle affectionne la scène musicale Piu Piu ainsi que le rock psychédélique brésilien des années ’70 – entre autres styles, tous plus éclectiques les uns que les autres. 

En tournée européenne jusqu’au 31 août, ensuite au Festival de musique émergente de Rouyn-Noranda (FME) le 2 et le 3 septembre, elle lancera en octobre un EP intitulé No Toning Down.

PAN M 360  l’attrape au vol tandis qu’elle quitte Amsterdam, direction Rotterdam.

PAN M 360  Tu as pratiqué la danse de l’âge de 4 à 17 ans, est-ce que c’est la suite logique des choses que tu aies choisi une carrière où tu fais danser les gens?

Gayance: Oui… J’imagine! Wow! Cette question, vraiment dix sur dix! (rires) Je ne sais même pas quoi répondre! On me pose toujours les mêmes questions puis je réponds toujours les mêmes réponses!  Je suis émue parce qu’on ne me demande jamais ça. La danse est vraiment le cœur de ma pratique. En fait, j’aimerais redanser encore. Quand j’aurai des fonds pour pouvoir faire du visuel, j’aimerais avoir beaucoup plus de danse présente avec mon visuel. C’est aussi comme ça que je fais de la musique : je suis devant l’ordinateur en train de danser! Aujourd’hui j’ai sorti une chanson avec Kallitechnis et on s’est mis dans un studio de danse avant d’aller dans le studio de musique : on dansait ensemble!

PAN M 360: Pour tester le tout?

Gayance:  Oui! C’est vraiment au cœur.

PAN M 360: Tu es montréalaise, mais tu vis depuis quelques années à Bruxelles; pourquoi Bruxelles?

Gayance:  Depuis la pandémie je ne suis plus à Bruxelles, mais je suis à Bruxelles parce qu’en 2012, j’ai fait un documentaire qui s’appelle Piu Piu. C’est un film à propos du Montreal Beat Scene qui répertoriait la scène musicale montréalaise de l’époque, avec les Kaytranada, High Klassified, Alaclair Ensemble et tout. Mais au Québec, on me disait : « c’est un engouement passager, ça va passer ». J’étais fâchée parce que je croyais que ce n’était pas un engouement passager et que c’était un moment historique. Dix ans plus tard, deux prix Grammy dans l’équipe, ce n’était pas un engouement passager : c’était un vrai moment historique. Mais évidemment, nul n’est prophète dans son pays. Il y a des Belges qui se sont vraiment intéressés au film parce que je parlais de l’aspect bilingue de Montréal, de son multiculturalisme, et des influences de groupes comme Flying Lotus, J. Dilla et Madlib. Ils étaient comme « Hey, nous aussi on est bilingues, nous aussi on trippe Flying Lotus, J. Dilla et Madlib. On est pareils, mais dans un univers parallèle ». Depuis 2012, ils sont venus ici, ont fait un documentaire sur nous, et sont devenus mes amis. La première fois que je suis allée en Europe c’est en 2016, ensuite je suis déménagée l’année d’après à Bruxelles et j’avais déjà tout plein d’amis là-bas.


PAN M 360:  D’où vient ta passion pour le rock psychédélique brésilien?

Gayance:  Tu sais, j’ai toujours été une fille très « rock ». Quand j’étais petite, je pratiquais la danse contemporaine, le ballet, et le jazz funky comme ils l’appelaient. J’ai fréquenté aussi une école de Street Dance. Mais ce que j’écoutais venait de ma mère, qui a autrefois dansé pour La La La Human Steps. Elle écoutait du Art of Noise, alors j’aime beaucoup la musique vraiment bizarre pour danser et je recherchais toujours ça dans mon adolescence. Puis j’ai toujours été une fan de Jimmy Hendrix. En allant au Brésil, j’ai découvert qu’eux aussi avaient une scène de rock psychédélique des années fin ’60 début ’70, alors j’en ai acheté des disques! Il y a justement un livre sur les 100 meilleurs albums vinyles de musique psychédélique brésilienne, et sur les 100 j’en ai 10! Et de musique brésilienne, j’en ai au moins une centaine ou plus.

PAN M 360: Justement, on entend que ta collection de vinyles est très prisée !

Gayance:  Oui, avant que je fasse de la musique moi-même, que je sois DJ moi-même, il y avait plein de beatmakers qui venaient échantillonner mes vinyles. J’ai toujours été celle qui était DJ sans nécessairement faire de la musique. On parle de 2012 ici, parce que j’ai commencé à mixer en 2013. Mais oui, j’ai une petite oreille fine! (rires)

PAN M 360:  Et c’est quoi ton achat le plus récent? 

Gayance: OMG!!! (rires)

PAN M 360:  N’en choisis qu’un seul! (rires)

Gayance:  J’vais te raconter une histoire! Je suis à Amsterdam et j’ai un dealer de vinyles ici. Il est dans un band de rock psychédélique brésilien et il a sa boutique dans le Red Light. Alors, tu as des cabines avec des putes, ensuite tu as une petite ruelle, et là tu as un magasin de vinyle dans la cabine de prostituées! Il vend seulement du psychédélique, et venant de partout dans le monde. Mais je ne suis pas encore allée le voir : je vais l’appeler et le voir peut-être demain ou avant que je parte d’Amsterdam, quitte à ce que je fasse un voyage d’une journée pour aller le voir. Mais je suis allée dans un autre magasin ici qui s’appelle Rush Hour, qui est aussi un label : j’y ai trouvé un vinyle que je voulais depuis 8 ans et je me suis mise à pleurer dans le magasin! C’était trop! L’album s’appelle Brasil 1500 de Manduka.

PAN M 360:  Vas-tu t’en servir au FME?

Gayance:  Je ne le sais pas! Je ne sais pas ce que je vais faire au FME en vérité! C’est toujours comme ça, je suis toujours stressée quand je joue au Québec, c’est viscéral : j’ai envie de vomir, je suis obligée de boire des shots à des heures bizarres…je ne suis pas capable de gérer mon stress! Quand je joue au Québec, je sens toujours une espèce de pression, du genre « la fille, elle joue à l’international, faut qu’elle soit la meilleure ». Ça joue avec ma tête, tu sais! Parce que mes sets sont éclectiques! Je sais ce que je vais jouer trois jours en avance, c’est un truc d’humeur. Mais tout peut arriver. J’ai des influences en ce moment que j’ai envie de partager : sur le broken beat beaucoup, j’écoute aussi beaucoup de house british, beaucoup de drum & bass, beaucoup de R&B…jouer une petite bossa clairement…mais je ne sais pas encore ce que je vais faire.

PAN M 360:  No Toning Down était prévu pour septembre mais finalement sortira en octobre. Que tenais-tu à faire absolument pour ce premier EP?Gayance:  Bien je voulais juste mettre mon pied à terre. C’est vraiment juste ça. Je ne fais rien de nouveau. J’arrête d’être la mamie et je prends mes couilles, quoi!

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